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État, acceptabilité sociale et controverses

Le rôle de l’État au regard de l’acceptabilité sociale des grands projets : quelques repères

Pierre Batellier

Résumés

Dans le contexte actuel de nombreuses contestations de grands projets au Québec, le rôle de l’État au regard de l’acceptabilité sociale de tels projets doit être examiné. Or, les interventions de l’État et leur influence sur les réponses du public sont le plus souvent considérées à la pièce, sans perspective globale ni référence à une certaine conduite ou posture attendue de l’État dans la société, rendant la discussion difficile. Cet article propose des repères pour un tel examen. Nous appuyant sur une analyse critique de la littérature afférente à l’acceptabilité sociale, sur l’observation participante au cœur de plusieurs débats récents au Québec et l’analyse d’ouvrages multidisciplinaires sur le rôle de l’État, nous proposons une synthèse des mécanismes par lesquels l’État influence la réponse du public à un projet, une grille classifiant les différentes approches du rôle de l’État comme conduite sociale organisée et, enfin, six critères génériques pour examiner ce rôle tant comme influence que comme conduite sociale.

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Texte intégral

  • 1 Voir la liste que nous en avons dressée dans Batellier, Acceptabilité sociale, cartographie d’une n (...)

1Au cours de la dernière décennie, le Québec a connu de nombreuses mobilisations sociales liées à de grands projets (« grands » par le montant élevé des investissements consentis, la durée des travaux et l’importance des impacts économiques, sociaux et environnementaux) : projets miniers, terminaux méthaniers, exploitation et transport des hydrocarbures, lignes électriques, projets éoliens, infrastructures de transport, etc.1 De nombreux acteurs sociaux aux échelons local, régional, voire national contestent ouvertement de tels projets, aussi bien dans les régions urbaines que rurales, éloignées ou en difficulté économique. Les préoccupations exprimées sont diverses : impacts environnementaux, atteintes à la qualité de vie, conflits d’usages du territoire, détérioration du paysage, processus décisionnel et participatif défaillant, mode de gestion du projet par le promoteur, vision inadéquate de l’intérêt collectif, du développement ou de l’utilisation des fonds publics, etc. Ne pas prendre en compte ces préoccupations peut compromettre la réalisation et la viabilité des projets, empêcher leur éventuelle bonification, générer des impacts sociaux négatifs et entraîner des conflits.

  • 2 Voir Batellier (2015) pour une caractérisation des définitions existantes.

2Ces mobilisations sociales ainsi que les (tentatives de) réponses apportées par les promoteurs et les décideurs publics sont de plus en plus envisagées sous l’angle de l’acceptabilité sociale. La notion est devenue la pierre angulaire des discours, arguments et pratiques des parties prenantes aux débats entourant les grands projets. Il coexiste une multitude d’acceptions et de champs de signification de ce terme, souvent implicites, qui varient selon les acteurs et leurs intérêts, et selon les problématiques sociétales2. Bien qu’évoquée dans les évaluations et décisions de nombreuses institutions publiques au Québec (Bureau d’audiences publiques en environnement – BAPE ; Commission de protection du territoire agricole – CPTAQ ; Vérificateur général du Québec, etc.) et largement mobilisée comme critère de décision par les décideurs gouvernementaux, cette notion d’acceptabilité sociale est rarement définie et demeure absente du cadre légal et réglementaire. Si la malléabilité de la notion permet l’émergence de différents construits sociaux alimentant un précieux débat, elle pose aussi le risque d’en faire un terme « valise » manipulable au gré des intérêts des acteurs, favorisant une méfiance, un dialogue de sourds, voire des conflits sur le sens et les usages de ce terme.

3Ces mobilisations sociales, la plupart des préoccupations qui les sous-tendent, leurs conséquences socioéconomiques et environnementales ainsi que le débat actuel sur la notion d’acceptabilité sociale interpellent directement ou indirectement l’État et ses interventions. Jusqu’ici traité par les médias, par une partie des décideurs publics comme privés et par certains chercheurs de manière périphérique à la dynamique d’échanges entre citoyens et promoteurs des projets, l’État est désormais au centre des discussions et son rôle au regard de l’acceptabilité sociale fait l’objet d’une attention soutenue, notamment au Québec. Cependant, trouver des repères pour aborder et discuter la question est encore difficile.

4Dans la sphère scientifique, la question de l’acceptabilité sociale a fait, au Québec et dans d’autres pays développés, l’objet d’un intérêt soutenu depuis une quinzaine d’années. La recherche s’est beaucoup intéressée aux facteurs influençant les réponses du public et, plus récemment seulement, au développement conceptuel et théorique de la notion – voir par exemple, Gendron (2014) ou Fournis et Fortin (2015). Plusieurs facteurs d’influence faisant intervenir l’État, notamment liés au processus de décision entourant les projets, ont été mis en évidence de même que le rôle de certaines institutions publiques telles que le BAPE (Gauthier et Simard, 2011) ou les maires (Yates et Arbour, 2016) ou de certains outils privilégiés telle l’évaluation environnementale de grands projets (Fortin, 2009). Cependant, il n’existe actuellement pas de perspective d’ensemble englobant les différentes interventions critiques de l’État. De plus, au-delà de la mise en évidence de l’influence sur la réponse du public de certaines interventions de l’État, les résultats attendus ou visées implicites de celles-ci, de même que les fondements, principes et visions de l’État sur lesquels elles s’appuient sont rarement précisés et discutés, ni situés au regard d’éventuelles attentes sociales à cet effet.

  • 3 Présentation dans le cadre des activités du Collectif scientifique sur la question du gaz de schist (...)
  • 4 Site web de Strateco – Procédures judiciaires : http://www.stratecoinc.com/fr/20150527-1034-procedu (...)
  • 5 Site du Parti libéral du Canada – Engagements électoraux – Évaluation environnementale. En ligne à (...)

5Ce besoin de clarification et de précision se fait aussi sentir au Québec sur le terrain des débats. Au cours des dernières années, plusieurs acteurs ont interpellé le gouvernement sur sa gestion de dossiers controversés, que ce soit le Vérificateur général du Québec dans ses rapports concernant le dossier des mines (2009) et du gaz de schiste (2011) ou encore le BAPE qui, dans ses rapports portant sur Mine Arnaud (2013) et les enjeux liés à l’exploration et l’exploitation du gaz de schiste (2014), souligne la nécessité pour le gouvernement de clarifier sa conception de l’acceptabilité sociale et le rôle qu’il entend jouer à cet effet. La Fédération des chambres de commerce du Québec, dans un souci de mieux considérer la dimension économique dans l’évaluation des projets et d’assurer une certaine prévisibilité, formule des demandes similaires dans une perspective de responsabilité partagée de l’acceptabilité sociale entre promoteur et gouvernement (Bertrand, 2014). Le Centre québécois du droit de l’environnement interpelle directement l’État avec son constat qu’au cours des dernières années, ses batailles juridiques n’ont plus été menées contre des entreprises mais contre des institutions gouvernementales défaillantes3. Depuis 2014, l’entreprise uranifère Strateco conteste en cour la suspension de ses certificats d’autorisation par le gouvernement qui justifie cette décision par le manque « d’acceptabilité sociale suffisante »4. Dans ce contexte ont été lancés, en 2015, le Chantier sur l’acceptabilité sociale qui a débouché sur la publication en février 2016, d’un Livre vert intitulé Orientations du ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles en matière d’acceptabilité sociale (MERN, 2016), et le Projet de modernisation de la Loi sur la qualité de l’environnement (MDDELCC, 2015) qui visent, entre autres, à mieux prendre en compte l’acceptabilité sociale dans les procédures d’évaluation environnementale. Enfin, le nouveau gouvernement fédéral a annoncé une révision des procédures d’évaluation environnementale des grands projets5.

6Le contexte actuel est donc propice à un examen plus approfondi et systématique et à une réflexion plus globale et structurante du rôle de l’État au regard de l’acceptabilité sociale de grands projets au Québec. Dans cette perspective, les angles d’analyse esquissés dans cet article visent à stimuler la réflexion autour des quatre questions suivantes :

  1. Qu’entend-on par rôle de l’État ?

  2. Par quelles interventions l’État peut-il influencer la réponse du public à un projet ?

  3. Comment examiner ces interventions critiques et leur influence ?

  4. Comment les mettre en perspective au regard d’attentes sociales à cet effet ?

7Après avoir précisé les acceptions retenues pour les notions d’État, de rôle (autour notamment de la nuance entre rôle joué par l’État comme influence sur la réponse du public et rôle attendu par les acteurs) et d’acceptabilité sociale, nous présentons notre méthodologie. Ensuite, à partir d’une analyse de la littérature afférente à l’acceptabilité sociale et au regard d’une observation participante, nous proposons une synthèse des types d’interventions de l’État pouvant influencer les réponses du public à un projet soit le rôle joué par l’État. Puis, nous appuyant sur l’analyse de propositions d’auteurs centrées sur le rôle de l’État, nous proposons une grille distinguant cinq angles d’approche du rôle de l’État comme conduite sociale organisée, puis six critères génériques d’examen de cette conduite sociale et de son influence potentielle. Enfin, nous ouvrons des pistes de discussion à partir de ce travail d’analyse et de catégorisation.

Définitions des notions clefs

  • 6 Ont été notamment utilisés le dictionnaire ATILF de l’Université de Lorraine, le Larousse en ligne, (...)

8Au terme d’une analyse lexicographique basée notamment sur la consultation de dictionnaires et de thésaurus de référence en français6, le principal critère de choix des acceptions retenues est leur potentiel d’inclusion sémantique, de façon à garder la discussion la plus ouverte possible sur le rôle de l’État en matière d’acceptabilité sociale.

9État – Dans leur Dictionnaire critique de la sociologie, Boudon et Bourricaud (1982 : 166) préviennent dès l’introduction qu’il est pratiquement impossible de définir l’État d’une manière pleinement satisfaisante. Le premier facteur tient à la diversité de ses acceptions pouvant être regroupées principalement autour des six acceptions formelles suivantes :

  1. Un sujet juridique, soit une personne morale de droit public sur le plan du droit international ;

  2. Une communauté de personnes, socialement et politiquement organisée, établie sur un territoire propre sur lequel elle exerce sa souveraineté;

  3. Un mode d’organisation sociale, politique et juridique sur un territoire donné, visant principalement à poser les conditions du vivre-ensemble ;

  4. Un ensemble d’institutions publiques caractérisées par la détention du monopole de l’édiction de la règle de droit et de l’emploi de la force publique ;

  5. Une puissance d’action, de commandement et de coercition ;

  6. Un instrument ou un véhicule au service d’une fin.

10Ces acceptions ne sont pas mutuellement exclusives et témoignent du caractère multiple et intrinsèquement complexe de l’État (Rosanvallon, 1990 : 10). Une tension oppose, d’un côté, une entité abstraite supérieure, permanente, idéale et dénuée de valeurs, niant la possibilité de conflits internes et de visées contradictoires, avec pour seul objectif de servir ceux qui l’ont élue ou choisie et, de l’autre, un ensemble très éclaté d’institutions très concrètes avec des prérogatives et pouvoirs et missions variées, potentiellement parcourues de fragmentations institutionnelles, d’incohérences, de tensions et de contradictions internes. À titre d’exemple, l’État québécois se compose essentiellement du gouvernement, de l’Assemblée nationale, des institutions indépendantes nommées par le gouvernement (par exemple le BAPE et la CPTAQ) ou le Parlement (le Vérificateur général, la Commission d’accès à l’information, le Commissaire au lobbyisme, le Protecteur du citoyen, etc.), des cours de justice, de l’administration publique nationale, des organismes parapublics dont les instituts de recherche, des municipalités et des entreprises publiques comme Hydro-Québec). Bien que le gouvernement détienne, au Québec, l’essentiel du pouvoir politique et constitue l’autorité politique qui gouverne l’État, il ne peut l’exercer qu’avec l’aide de l’administration publique et le fait dans l’interaction, parfois contradictoire et conflictuelle, avec les autres entités de l’État. Si nous parlons dans cet article de l’État de manière générique, notamment pour son caractère englobant et permanent assurant une continuité entre les gouvernements, nous adhérons néanmoins à une vision de l’État complexe et potentiellement fragmenté sur le plan institutionnel ou culturel, mais aussi – comme le soulignent Pierre et Peters (2000) – à une vision dynamique de l’État dont la forme et l’autorité sont le fruit d’un construit social. Dans une perspective de gouvernance, nous ne réduisons pas non plus l’État à ses dimensions institutionnelles et à ses pouvoirs constitutionnels et formels, et considérons ses autres moyens d’influence et de contrôle comme la communication, l’information, les alliances, les partenariats, etc. (Pierre et Peters, 2000)

11Rôle – Quatre sens de rôle ont été retenus de notre analyse : 1) le rôle joué, soit l’influence que l’on exerce ou l’action que l’on a sur quelque chose. Au-delà de ce sens axé sur une relation de cause à effet, les autres acceptions portent sur une certaine conduite organisée en société autour de trois nuances ; 2) Le rôle établi est la ou les fonction(s) (idée d’utilité), tâche(s) à exercer ou, au sens politique, mission(s), propre(s) et communément admise(s) de quelqu’un ou de quelque chose ; 3) Le rôle affiché correspond aux comportements ou à l’attitude que l’on montre dans certaines circonstances, souvent dans le but de projeter une certaine image de soi aux autres ; enfin, 4) le rôle attendu correspond, dans une perspective psychologique ou sociologique, à l’image sociale d’un individu ou d’une organisation auprès du public relativement à son statut et à sa (ses) fonction(s). Henri Piéron parle d’un « modèle organisé de conduite, relatif à une certaine position dans la société ou dans un groupe et corrélatif à l’attente des autres ou du groupe » (1973). Ce rôle attendu peut être défini de manière formelle et explicite par un cadre institutionnel, comme ce peut être le groupe ou la société qui informellement investit un individu ou une organisation d’un rôle implicite (leader, bouc émissaire, protecteur, garant des valeurs, etc.).

12Ces différentes dimensions du rôle sont interreliées : porter un regard critique sur le rôle joué par un acteur dépend des visions existantes de son rôle établi, du rôle affiché que vise à projeter cet acteur et du rôle attendu par les autres acteurs qui peut sensiblement différer des rôles établi et affiché. Inversement, ces trois rôles se construisent en fonction du rôle qui peut être joué par l’acteur considéré.

  • 7 Attitude est considérée ici au sens de démarche d’évaluation et de disposition générale à l’égard d (...)

13Acceptabilité sociale – Nous appuyant sur une analyse antérieure (Batellier, 2015), nous avons choisi une acception large et ouverte de cette notion, soit la réponse du public à un projet. À la fois processus et résultat, cette réponse, envisagée dans une perspective dynamique évoluant dans le temps, implique la mobilisation (ou non) d’un ensemble d’informations cognitives et expérientielles, de perceptions, d’intuitions, d’éléments affectifs ou de l’ordre des valeurs, débouchant sur une évaluation, un jugement et/ou une décision et se traduisant en attitudes7 et comportements incluant les possibilités d’inaction et de silence. Nous n’associons pas ici l’acceptabilité sociale à aucun résultat déterminé : réponse favorable, non défavorable, large consensus ou autre.

Méthodologie

  • 8 La démarche d’observation participante de même que la méthodologie de l’analyse documentaire sont p (...)

14Pour mettre en évidence le rôle de l’État comme influence, directe et indirecte, sur les réponses du public à un projet, nous nous sommes appuyés sur deux stratégies, soit l’analyse documentaire et l’observation participante8. Afin de dresser un bilan de l’apport de la littérature spécialisée sur l’acceptabilité sociale, une recension exhaustive des écrits a mené à la sélection et à l’analyse de 250 résumés de textes scientifiques datant de 2003 à 2013, dont l’objet principal était la question de l’acceptabilité sociale et/ou la réponse du public à un ou des grands projets en contexte de pays développé. Quarante textes ont ensuite été sélectionnés pour analyse, en fonction de leur pertinence à l’égard du rôle de l’État au regard de l’acceptabilité sociale des grands projets, des éléments de synthèse apportés et de la diversité des approches et des secteurs d’activité couverts. Cette recherche s’appuie aussi sur une démarche d’observation participante au Québec entre 2009 et 2016 à l’occasion de conférences et de séminaires portant sur l’acceptabilité sociale et par une implication active dans plusieurs dossiers ayant fait l’objet d’une importante mobilisation citoyenne : un projet éolien, la question du gaz de schiste et des hydrocarbures, les redevances minières et le Plan Nord, la consigne sur les contenants de boissons et le Chantier sur l’acceptabilité sociale. L’observation des discussions et la participation active au cœur de ces débats récents ont permis de dégager des pistes de questionnement critique, d’examiner la concordance entre les écrits académiques et les situations observées, et de valider certaines catégories théoriques sur le terrain des débats en cours.

15Afin de structurer la discussion sur le rôle de l’État, nous avons analysé diverses propositions d’auteurs affleurant dans la littérature multi et interdisciplinaire relative au rôle de l’État à partir d’une recherche bibliographique interrogeant trois bases de données autour des mots clés suivants : rôle, fonctions, conduite, État, gouvernement. Parmi les références ciblées durant la recherche, nous avons privilégié les ouvrages présentant une synthèse de cette question dans leur champ respectif et les textes interrogeant spécifiquement les interventions, les rôles, les pouvoirs et les capacités d’action de l’État pour finalement retenir 15 textes permettant d’accéder à une diversité de perspectives et de champs disciplinaires s’étant intéressés au rôle de l’État : les sciences politiques et la philosophie politique (Chomsky, 2005) ; l’histoire de l’État (Rosanvallon, 1990) ; le droit international public, notamment au regard de la mondialisation, de la gestion des biens publics et des ressources naturelles (Andrews-Speed, 2008 ; Crépeau, 1997) ; l’économie politique (Bottini, 2012 ; Laforce, Campbell et Sarrasin, 2012 ; Stiglitz, 1989) ; l’économie des ressources naturelles (Blanco et Razzaque, 2011) ; les finances publiques (Musgrave, 1998) ; les sciences sociales et la sociologie autour des controverses (Callon, Lascoumes et Barthe, 2001) et de la question du risque et de l’incertitude (Beck, 1992 ; O’Malley, 2006) ; les sciences de la gestion, dans la mouvance de la responsabilité sociale de l’entreprise (Gond, Kang et Moon, 2011) et le champ de la gouvernance souvent mobilisé comme cadre d’analyse des capacités de l’État à répondre aux enjeux sociaux et des relations entre État et société (Pierre et Peters, 2000). Cet échantillon de textes (articles et ouvrages) ne vise pas à dresser un portrait exhaustif de la littérature et de sa contribution, mais à déterminer différents angles de questionnement des interventions de l’État et différentes approches, explicites ou implicites, de la notion de rôle de l’État qui pourraient ensuite nous être utiles au moment d’interroger ce rôle au regard de l’acceptabilité sociale des grands projets. L’exercice a permis de dégager des catégories qu’il restera à vérifier par triangulation auprès d’acteurs clefs du point de vue de leur propre observation participante et par mise à l’essai dans un ensemble d’études de cas.

Le rôle joué par l’État – principales interventions influençant la réponse du public à un projet

16Si de nombreux facteurs peuvent influencer la réponse du public à un projet, leur lien avec l’État et les canaux d’influence par lesquels s’exerce cette influence ne font pas l’objet d’une attention particulière. Aussi, cette section dresse-t-elle un portrait de ces principaux canaux, essentiel pour saisir la nature et la portée potentielle de cette influence et, par la suite, l’examiner et la mettre en perspective au regard d’attentes sociales.

17Selon notre étude documentaire, à l’exception de quelques analyses multifactorielles fouillées et de larges synthèses récentes (Fortin et Fournis, 2013 ; Gauthier, Chiasson et Robitaille, 2015 ; Saucier et al., 2009 ; Wolsink, 2012), la plupart des textes tirés de la recension d’écrits sont des études empiriques sur l’influence d’un ou de plusieurs facteurs sur les perceptions du public à propos d’un projet local et sur les comportements de contestation ouverte. Jusqu’à récemment, les silences ou les attitudes de soutien aux projets ont été peu considérés (Ellis, Barry et Robinson, 2007) et seuls les textes récents dépassent les perceptions pour s’intéresser aux attitudes, comportements et discours ainsi qu’aux nuances entre ces réponses. Dans l’ensemble, pour ce qui est de la formation des réponses du public, ces recherches ont contribué à identifier, dans des contextes culturels et nationaux variés et à différentes échelles, 12 principaux facteurs clefs, dont plusieurs sont liés à l’État. Même s’il est difficile de fragmenter la réponse du public et ses motivations profondes, ces facteurs fournissent des repères très utiles pour tenter de comprendre la réponse du public à un projet.

18Certains facteurs semblent être analysés depuis plus longtemps, mis en relief entre autres par les disciplines de l’économie, de l’ingénierie, des relations industrielles, de la gestion et, dans une moindre mesure, des sciences politiques :

(1) la nature et les caractéristiques du projet et ses impacts sur le milieu d’accueil autour d’éventuels ajustements techniques, esthétiques et visuels possibles, dans une vision assez étroite du territoire et du paysage (géospatiale, économique, sociodémographique) ;

(2) les compensations pécuniaires des impacts locaux du projet ;

(3) la gestion du projet par le promoteur (information, communication, participation publique, relations avec les communautés, etc.) ;

(4) la perception du risque et de l’incertitude du public ;

(5) le niveau de connaissance générale et d’information du public.

Si ces cinq éléments occupent encore une place majeure dans l’analyse des facteurs d’influence de la réponse du public, ils ont été progressivement complétés par d’autres facteurs, identifiés plutôt par des acteurs en sciences de l’environnement, en géographie, en sociologie et en anthropologie :

(6) le milieu d’accueil du projet et son adéquation avec le projet proposé autour d’une compréhension et d’une conceptualisation plus fine et complexe du territoire et du paysage, prenant en compte notamment les dimensions culturelles, politiques, sociales (identités, représentations, valeurs) et leur caractère dynamique ;

(7) les considérations de justice distributive, liées à la répartition des retombées et des impacts positifs comme négatifs ;

(8) le processus décisionnel et sa légitimité au regard notamment de la question de la justice lors des procédures de consultation ou de participation, d’administration et de décision, ou encore de jugement ;

(9) le cadre institutionnel entourant le projet et la prise de décision (politiques publiques structurantes, gouvernance, planification stratégique, encadrement réglementaire, etc.) ;

(10) l’influence de la confiance et de la légitimité des différents acteurs, tout particulièrement des promoteurs du projet, dans une moindre mesure des agences chargées du contrôle, des scientifiques, des experts et, très rarement, du citoyen ;

(11) la dynamique sociale et de débat public (émergence des enjeux et des termes du débat, espaces de débats, niveau de conflictualité, etc.) ;

(12) les dynamiques de mobilisation citoyenne (acteurs, ressources et compétences mobilisés, forme des mobilisations, stratégies, etc.).

19Le caractère dynamique des projets, de leur territoire d’accueil mais aussi des réponses du public, même s’il est désormais largement reconnu, manque encore souvent dans la présentation et l’analyse des facteurs. Plusieurs facteurs sont souvent traités de manière statique au moment de l’annonce du projet dans le milieu ou de sa contestation ouverte, si bien que plusieurs éléments en amont ou en aval tendent à être négligés. De fait, nous proposons de déterminer, de manière très générale et non contextualisée, et de classer les facteurs d’influence liés à l’État en différenciant les déterminants en amont, pendant et en aval du projet.

En amont du projet

20Le facteur lié à l’État le plus traité dans la littérature tient à l’influence directe de l’État sur le processus décisionnel entourant le projet incluant sa planification, son évaluation et son autorisation. La nature (comparative, évaluative, décisionnelle, participative, etc.), les critères d’analyse et de décision retenus et les caractéristiques et exigences du processus de décision (durée, appel d’offres, niveau d’information et de transparence requis, acteurs impliqués, etc.) influencent le type de promoteur, de projet et de(s) milieu(x) d’implantation. Au moment de la conception du projet, le processus décisionnel va influer sur ses grandes caractéristiques (design, taille, organisation spatiale, équipements, technologie, etc.). Par ailleurs, le processus de décision prédétermine une certaine répartition des ressources entre les acteurs, notamment par la volonté d’accompagner (ou non) certains d’entre eux (promoteur, municipalités, riverains, citoyens). Il répartit aussi en amont les responsabilités entre promoteur et gouvernement, ainsi que les pouvoirs d’arbitrer, de trancher et/ou de poser un veto entre les différentes instances territoriales (locales, régionales et nationale) (Nadaï, 2007). Le processus décisionnel en place va aussi déterminer le moment de l’entrée du projet dans l’espace public (délivrance d’un permis, avis de projet, consultation préalable obligatoire, etc.) notamment au regard de décisions déjà entérinées et des phases prévues (ou non) d’information et de participation du public. Cette dimension temporelle peut influencer les perceptions et les sentiments potentiels de « surprise » et de « fait accompli » des acteurs. Tous ces éléments influeront sur la dynamique du débat, sa potentielle conflictualité et la mobilisation citoyenne, mais aussi – notamment selon les perceptions de sa capacité à favoriser la justice procédurale et distributive et à éviter les conflits dans la communauté – la légitimité propre du processus de décision (Gross, 2007). De nombreuses recherches viennent confirmer la théorie selon laquelle, à moins de questions morales ou de principes non négociables et de dynamiques de groupes où un résultat particulier fonde l’identité du groupe, les personnes sont généralement plus concernées par la justice procédurale que par les résultats, car des processus justes tendent à produire des résultats justes – voir la synthèse de Visschers et Siegrist (2012).

21Le cadre institutionnel large dans lequel s’insèrent le projet et le processus décisionnel, soit les politiques publiques structurantes, la planification stratégique (sectorielle, thématique ou territoriale) ainsi que l’encadrement réglementaire, économique (fiscalité, opportunités de marché, ressources publiques disponibles, etc.) et juridictionnel (garanties juridiques, disponibilité et accessibilité des recours, possibilités d’arbitrage, etc.) influence également le(s) type(s) de promoteur (public/privé, local/externe, multinationales/petits joueurs, etc.), de projet (choix de filières, grands/petits projets, technologie privilégiée, etc.) et de milieu(x) visé(s) (Wolsink, 2012). Plus encore, lors de l’entrée du projet dans l’espace public, la préexistence de ce cadre et la possibilité de rattacher les projets à des visions, stratégies et politiques publiques (politique énergétique, stratégie minière, politique de participation publique, etc.) et à un cadre de régulation adapté et à jour peut contribuer à légitimer le projet et le processus de décision sur les plans cognitif, normatif et moral en venant notamment répondre au « pourquoi ? » au-delà du simple « comment ? » (Batellier, 2012 ; Gendron, 2014). La préexistence de ce cadre, sa profondeur, sa stabilité et son actualisation peuvent donner une impression de préparation, de vision et de maîtrise favorisant la confiance du public envers les autorités publiques et le promoteur. À l’inverse, cela peut donner une impression d’improvisation et de procédures sur mesure pour les promoteurs pouvant nourrir une méfiance et des perceptions d’incertitude et de risque, par exemple au regard de l’échelle et du rythme de développement d’un projet ou d’une filière (Jobert, Laborgne et Mimler, 2007). La cohérence entre le cadre institutionnel et le processus décisionnel est importante pour faire aboutir localement les objectifs des politiques, plans et stratégies décidés à l’échelon national ou régional et pour traiter, au niveau du système politique (plutôt que sur le terrain), des conflits et dilemmes entre échelles nationale et locale (Nadaï et Labussière, 2010 ; Wüstenhagen, Wolsink et Bürer, 2007). Enfin, le cadre institutionnel de départ et le processus de décision peuvent aussi influencer les futurs comportements des promoteurs, publics comme privés, dans la gestion de leur projet. Selon qu’ils soient plus ou moins préexistants, élaborés ou favorables au projet ou à la filière, cela peut favoriser différents comportements des promoteurs : un excès de confiance, un certain laxisme dans la considération du public ou, au contraire, une attention accrue à la résolution des conflits et au réseautage avec les acteurs locaux (Fortin, Devanne et Le Floch, 2010 ; Jobert, Laborgne et Mimler, 2007).

22L’État a évidemment une influence directe sur les caractéristiques du milieu d’insertion des projets. Par ses diverses interventions économiques et sa planification territoriale, l’État favorise certaines activités socioéconomiques, certains usages et aménagements du territoire. Il agit directement par ses politiques, plans et programmes sur le niveau de santé, d’information et d’éducation du public. Par l’organisation et la gestion administrative du territoire (niveau de centralisation, gestion top-down ou bottom-up), la nature des interactions entre les paliers gouvernementaux et la ou les cultures organisationnelles qu’il véhicule, l’État influence les caractéristiques sociopolitiques du territoire, par exemple, l’identité des groupes et des réseaux dominants ; la cohésion ou la division des leaders et des élites locales ; l’existence et la prépondérance d’une ou plusieurs cultures et traditions politiques locales (confrontation, compromis, collaboration, solidarité, dialogue, transparence, confiance envers le citoyen, etc.). Par ses actions, il influence, positivement ou négativement la capacité institutionnelle du milieu : le niveau d’engagement citoyen, la participation civique, l’existence de solidarités et de réseaux organisés et actifs, la capacité relationnelle et de mobilisation du milieu (Saucier et al., 2009 ; Wolsink, 2005). Enfin, l’État développe avec le milieu d’accueil un historique de relations et une expérience avec les autorités politiques en lien avec les projets : ce sont des éléments contextuels clefs au moment d’accueillir un nouveau projet et son processus décisionnel.

23En ce qui a trait au milieu d’accueil mais dans une perspective plus large, la dynamique générale de débat public préexistante au projet est déterminante pour la dynamique du débat propre au projet et donc pour la réponse du public. Les acteurs étatiques peuvent participer directement au débat public par les espaces de débat propres au monde politique (Parlement, cour de justice, conseils municipaux, etc.), par le travail des représentants élus, par un éventuel cadre institutionnalisé de participation publique (BAPE), ou encore, par la production, la diffusion et la valorisation d’informations et de savoirs (administration publique et organismes de recherche publics) (Commissaire à la santé et au bien-être, 2012). L’État influence la reconnaissance et la place des acteurs dans le débat public, en sollicitant le monde de la recherche ou le milieu communautaire dans les démarches publiques, en laissant une certaine marge de manœuvre critique à sa fonction publique ou encore lorsqu’émergent, lors de controverses, de nouveaux acteurs, coalitions et alliances et que des profanes viennent questionner les experts (Callon, Lascoumes et Barthe, 2001). Plus largement, il joue un rôle important sur la reconnaissance du citoyen et la confiance envers celui-ci et sa capacité de questionnement et de critique constructive ; élément de confiance clef mis de l’avant par quelques rares auteurs (Aitken, 2010 ; Fortin, Devanne et Le Floch, 2010). L’État peut aussi jouer sur les conditions et la dynamique du débat en défendant et en valorisant la liberté d’expression, l’indépendance et la diversité des médias, un large accès à l’information, aux décisions des pouvoirs publics et à leurs raisons/motivations, en prônant et en appliquant une culture politique de transparence, de respect, de débat libre et ouvert sur les grands enjeux. À l’inverse, par son (in)action, l’État peut favoriser un cynisme, un désengagement politique et un manque d’information de la population, une distance, une méfiance voire une défiance entre les acteurs sociaux (par exemple entre les groupes citoyens, environnementaux et le monde des affaires). Par ces canaux, l’État forge aussi un état des discussions collectives dans lequel tout projet va s’inscrire. Cela devient critique lorsqu’un projet soulève par sa nature, ses caractéristiques ou les acteurs qui le portent, un large débat de société dépassant un simple projet, que ce soit par exemple sur une filière complète, une stratégie globale ou une technologie. L’absence d’un tel débat en amont des projets entraîne d’importantes conséquences : pensons, par exemple, au Québec, aux activités de Strateco avant qu’ait lieu un débat sur la filière de l’uranium, ou à l’annonce du projet de développement de la filière du gaz de schiste avant l’ouverture d’un débat élargi sur la technologie de la fracturation hydraulique ou sur les hydrocarbures et la transition énergétique.

24Tous ces éléments participent d’une confiance préalable du public envers l’État et ses institutions ou inversement d’une absence de confiance. Cela influencera les perceptions du risque et de l’incertitude dans le milieu au regard d’un rôle de protecteur de l’État, mais aussi la demande d’information et la mobilisation citoyenne. En effet, les citoyens, notamment en contexte d’information complexe et d’incertitude, se tournent d’abord vers la confiance envers les autorités publiques et les experts externes. S’ils se mobilisent et exigent directement de l’information, c’est en partie en raison d’un déficit de confiance envers ces acteurs (Huijts, Midden et Meijnders, 2007).

Pendant et en aval du projet

25Une fois le projet en cours et lancé dans l’espace public, les interventions subséquentes de l’État demeurent déterminantes. Leur influence dépendra, entre autres, du niveau de confiance préalable des citoyens envers les autorités publiques et viendra soit la renforcer, soit la miner si jamais l’État apparaît comme complaisant, faible ou trop effacé.

26Même si le cadre institutionnel et le processus décisionnel déterminent en amont les actions et les décisions du promoteur, il y a souvent place à l’interprétation (par exemple, entre la loi et l’esprit de la loi au moment de décider ou non de la tenue d’un BAPE pour un grand projet) et aux nuances dans leur application, leur suivi et leur contrôle. Leur mise en œuvre peut en révéler certaines faiblesses, que ce soit pour justifier le projet ou la prise de décision, intégrer de nouveaux éléments de questionnement ou d’information, évaluer les impacts du projet ou encore, anticiper et effectuer les arbitrages et ajustements nécessaires. Par rapport à cela, l’État peut rester effacé ou, au contraire, de manière plus ou moins proactive, défendre publiquement le cadre institutionnel et le processus décisionnel, en préciser une interprétation, les ajuster ou exiger des ajustements de la part du promoteur. Bref, l’application et l’utilisation de ce que l’État a mis en place préalablement, notamment les propres règles qu’il s’est fixées, peuvent être un important déterminant des perceptions du public concernant tant le processus de décision que le projet lui-même.

27Outre le fait de contribuer à une dynamique générale de débat public, l’État est un acteur du débat spécifique au projet et son positionnement influe sur la dynamique. Il peut, par exemple, choisir de participer au débat, jouer un rôle clef dans la définition des enjeux et des termes du débat, se montrer ouvert au débat et à la réflexion, s’effacer (même s’il reste alors « l’éléphant dans la pièce ») ou encore offrir un processus de médiation ou un espace pour ces débats. Comme cela a déjà été précisé, au-delà de ses leviers réglementaires, légaux et normatifs, l’État influence le comportement des acteurs par son discours, ses communications générales, l’information qu’il rend publique et accessible, les jugements qu’il porte sur les autres acteurs, leurs arguments et attitudes. Autant d’éléments déterminants pour la réponse du public.

28Enfin, la réaction de l’État à la réponse du public est un autre facteur important rarement mis en évidence en tant que tel. Au bout d’un certain temps, potentiellement très rapidement, le public répond au projet… Quelle que soit cette réponse, du conflit ouvert au grand silence, l’État est interpellé et doit réagir. L’attention qu’il portera à cette réponse selon son niveau de préparation préalable, l’interprétation qu’il en fera selon certains postulats (Batellier, à paraître en 2016), et les éventuelles interventions subséquentes influenceront l’évolution de la réponse du public dans une perspective dynamique. À titre d’exemple, l’État s’interrogera-t-il sur les fondements de cette réponse et sur les messages qui lui sont directement ou indirectement envoyés ? Face à un conflit ouvert, le gouvernement cherchera-t-il à l’étouffer, à l’apaiser temporairement (par un moratoire, par exemple) ou à le comprendre et à le prendre en compte dans son processus décisionnel ? À l’inverse, face à une absence de contestation ouverte, les acteurs étatiques considéreront-ils qu’il s’agit d’un appui tacite ou vérifieront-ils qu’il ne s’agit pas d’un silence contraint ou résigné ? En cas de division apparente de la communauté, l’État entend-il rendre plus explicite une décision collective par un référendum ? Quelle sera sa prise en compte des revendications minoritaires, potentiellement très légitimes ? S’assurera-t-il que le promoteur considère aussi cette réponse du public ? Cette réaction de l’État est déterminante pour l’évolution de la réponse du public. Elle va dépendre notamment du rapport à la conflictualité des autorités publiques (Pham et Torre, 2012), de leur capacité à se questionner, mais aussi à agir dans l’incertitude et la controverse (Callon, Lascoumes et Barthe, 2001), à apprendre et changer (Shindler, Brunson et Stankey, 2002) et, sur le plan institutionnel, à trouver des compromis et à les faire reconnaître comme légitimes (Wolsink, 2012).

29En définitive, on constate un large spectre d’interventions critiques qui souligne la portée potentielle de l’influence de l’État sur la réponse du public aux projets soit le rôle joué par l’État.

Le rôle de l’État comme conduite sociale organisée – principales approches

  • 9 L’analyse plus détaillée de ces éléments fait l’objet d’une recherche en cours.

30Une fois les interventions critiques de l’État déterminées, les examiner, mais surtout les évaluer et les juger dépend de ce que l’on attend de ces interventions et de ce que l’on entend par rôle de l’État en tant que conduite sociale organisée. Aussi, faute d’identification de balises existantes à cet effet, nous appuyant sur notre analyse de la littérature afférente au rôle de l’État et sur notre observation participation, nous avons développé une grille de classification des différentes approches du rôle de l’État comme conduite sociale ou ensemble de comportements en société. Pour cela, nous avons cerné, dans chacun des textes analysés la manière dont le rôle de l’État était abordé. Nous avons constaté, sans surprise, une très grande diversité de rôle(s), portés par différentes institutions de l’État : État législateur, régulateur, promoteur, bon gestionnaire, stratège, défenseur de l’intérêt public, arbitre, investisseur, guide, etc.9 Notre constat majeur ne porte pas sur cette diversité elle-même qui n’est pas une surprise, mais sur l’absence de balises pour catégoriser ces rôles pourtant abordés sous des angles très différents, empêchant, selon nous, une réflexion élargie structurée sur ces différentes approches.

31Aussi, de cet ensemble large, avons-nous dégagé cinq manières d’appréhender ce rôle de l’État et de formuler ou de créer des attentes à cet égard : 1) comme champ d’intervention autour des prérogatives assignées à l’État de manière formelle ou informelle ; 2) comme mode d’intervention autour des outils et des stratégies choisis par l’État pour exercer ses prérogatives ; 3) comme objectif, résultat relativement précis et concret, visé par l’action de l’État ; 4) comme mission générale, spécifiant l’utilité et la finalité – plus large et abstraite que les objectifs – de l’action de l’État ; et enfin, 5) comme fondement, en tant que grand principe sur lequel repose l’État et qui légitime ou justifie ses interventions. Même si ces angles d’approches sont interreliés, ils doivent être différenciés, notamment aux fins de discussion et de comparaison au regard des questions différentes auxquelles ils répondent.

32Le tableau 1 présente les principales questions auxquelles répond chacune de ces approches du rôle de l’État et plusieurs exemples de composantes ou de dimensions de ce rôle.

Tableau 1 : Principales approches du rôle de l’État

Approche

Question

Exemples de composantes ou de dimensions

Champ d’intervention

Que fait l’État ?

Planification, régulation socioéconomique, décision et arbitrage, gestion des fonds publics, fiscalité, communication publique, délibération collective, etc.

Mode d’intervention

Comment agit l’État ?

Politiques publiques, réglementation, information, partenariats, effacement volontaire, prise de participation, etc.

Objectif

Que vise ou cible l’État ?

Équilibre budgétaire, absence de conflits ouverts lors d’un projet, baisse du taux de chômage, croissance du PIB, décontamination d’un site, appui de la majorité, etc.

Mission

À quoi sert l’État ?

Fiducie et gestion des biens publics, allocation efficace des ressources, maintien de l’ordre, intermédiation des intérêts et arbitrage, garantie des libertés et de l’égalité, assurance face aux risques majeurs, redistribution sociale, promotion du développement, protection de l’environnement, etc.

Fondement

Qu’est-ce que l’État ? Au nom de quoi agit-il ?

Incarnation de la souveraineté et de l’intérêt général, ciment social et condition essentielle du vivre-ensemble, force légitimatrice, véhicule de la démocratie, source ou véhicule de grandes transformations sociales, etc.

33La reconnaissance et la mise en évidence de ces nuances majeures nous semblent particulièrement utiles pour les débats entourant le rôle de l’État au regard de l’acceptabilité sociale des grands projets étant donné les nombreuses confusions que nous avons constatées au cours de notre observation participante, par exemple durant les débats entourant les deux grands Livres verts gouvernementaux lancés en 2015 et 2016. Le manque de nuances entre des éléments relevant de champ d’intervention, de mode d’intervention, d’objectifs, de missions et de fondements complexifie la réflexion spécifique sur le rôle de l’État ou de l’une de ses composantes. Plus encore, il empêche la conception, la comparaison et la discussion de perspectives larges du rôle de l’État articulant correctement les différents niveaux de rôle. Cela favorise notamment une absence de réflexion sur les grandes missions et fondements de l’État.

Critères d’examen des interventions de l’État et de leur influence

34Une fois cette diversité d’interventions critiques ciblées et leur portée potentielle soulignée ainsi que la diversité possible des attentes quant au rôle de l’État mise en perspective, se pose la question des éléments génériques de questionnement qui pourraient permettre d’examiner ces interventions, au-delà des contextes particuliers des projets. Faute d’avoir identifié de tels outils préexistants dans la littérature afférente à l’acceptabilité sociale et dans notre échantillon de textes sur le rôle de l’État, nous avons répertorié dans ces textes les angles privilégiés pour examiner les interventions de l’État et leur influence, en vue de les appliquer éventuellement au rôle de l’État au regard de l’acceptabilité sociale de grands projets.

35L’exercice a permis de dégager six principaux critères d’examen des interventions de l’État : performance, puissance, pertinence, cohérence, légitimité et résilience. Non mutuellement exclusifs et parfois complémentaires, ces critères découlent de différents constats initiaux des auteurs provenant de champs scientifiques particuliers autour de problématiques particulières. Ils sont associés par ces auteurs à plusieurs questions spécifiques qui reviennent de manière récurrente dans les textes analysés optant pour ce critère d’examen. Tous ces éléments sont présentés dans le tableau 2.

  • 10 Pensons, au Québec, aux exemples de Mine Arnaud ou d’Hydrocarbures Québec.

36Ces six angles différenciés nous semblent relativement transversaux aux divers modèles de conduite que l’on peut envisager pour le rôle de l’État. Ils peuvent constituer, selon nous, des repères utiles pour guider et améliorer significativement l’examen critique des interventions de l’État au regard de l’acceptabilité sociale des grands projets, notamment en forçant les acteurs à clarifier les critères et les angles de questionnement qui les amènent à s’interroger sur les interventions de l’État. Ainsi, les enjeux et problématiques éventuels associés à ces interventions relèvent-ils d’un enjeu de performance des actions existantes, de pertinence au regard des problématiques ou de puissance d’action au regard d’un nouveau contexte institutionnel ? S’agit-il d’une question de cohérence générale, par exemple, entre les interventions en tant que promoteur de projets et comme arbitre et régulateur10 ou, plus fondamentalement, d’une question de crise de légitimité plus profonde de certaines institutions de l’État ? Enfin, dans une perspective de résilience, l’État a-t-il, la capacité, les outils ou les compétences pour surmonter ces chocs, a-t-il la volonté de le faire ? Des critères pouvant agir comme repères dans une démarche de questionnement.

Tableau 2 : Critères d’examen des interventions de l’État, constats initiaux et questionnements dominants

Critère d’examen

Constats initiaux – problèmes identifiés (selon les champs académiques)

Principaux questionnements associés

Performance

- Résultats insatisfaisants de l’action de l’État (finances publiques ; économie ; sc. politiques)

- Mal-développement lié aux ressources naturelles (économie des ressources naturelles)

- Conflits sociaux (géographie)

- Choix des critères de performance

- Choix des outils de planification et d’évaluation des interventions étatiques

- Efficience et dysfonctionnements politiques et administratifs

- Ressources et compétences de l’État

Puissance

- Nouveau contexte institutionnel 

- Contestation du pouvoir de l’État central : mondialisation, décentralisation, multinationales

- Crise des finances publiques

(droit ; gestion ; gouvernance ; sc. politiques)

- Statut et supériorité de l’État

- Marge(s) de manœuvre de l’État

- Nature et modalités de l’exercice du pouvoir par l’État

- Capacités institutionnelle et politique

Pertinence

- Évolution des enjeux : crise financière, conflits sociaux, épuisement des ressources naturelles, etc.

- Demande d’État par le public : stabilité, insécurité

(économie ; sociologie ; environnement)

- Adaptation des stratégies et instruments – Frontière processus politique et marché

- État comme défenseur de l’intérêt public

et pilier de dernier recours

Cohérence

- Multiplication des fonctions et institutions de l’État, et des tensions et contradictions entre elles

(géographie ; sociologie)

- Unicité de l’État

- Équilibre des fonctions de l’État

- Nature des arbitrages internes à l’État

Légitimité

- Crise de confiance du public envers l’État

- Désengagement du politique traditionnel

(sc. politiques ; économie ; gouvernance)

- Limites de la démocratie représentative

- Influence des groupes d’intérêt

- Frontières entre public et privé

- Nature de l’intérêt général / public

Résilience

- Inertie institutionnelle et bureaucratie

- Résistance de l’État sur la durée

(sc. politiques ; gouvernance)

- Volonté de changement ou de résistance

- Capacité d’adaptation de l’État

Conclusion

37La catégorisation de l’ensemble des interventions critiques de l’État a permis de différencier plusieurs grands facteurs d’influence liés à l’État, en amont, pendant et en aval des projets, et de souligner globalement la portée potentielle de cette influence. Pour dépasser l’analyse de la dynamique d’influence et en vue de porter un jugement critique et d’effectuer un diagnostic de ces interventions et de leur influence, nous avons proposé une grille de classification des manières d’aborder le rôle de l’État comme conduite sociale – et implicitement de formuler des attentes sociales à cet égard – ainsi que six critères d’examen de ces interventions.

38Bien qu’à l’état de propositions préliminaires, ces repères peuvent déjà être utilisés pour mieux comprendre et alimenter les débats en cours et guider un questionnement autour des interventions de l’État dans le cadre des grands projets. Ils peuvent, tant sur le plan scientifique que sur le terrain des débats en cours, inciter et aider les chercheurs, les acteurs étatiques et les autres acteurs sociaux à réfléchir sur la nature et la portée de l’influence de ces interventions, à structurer et à discuter les critères d’examen de ces interventions et de leur influence, mais aussi des attentes spécifiques qu’ils ont et que les autres acteurs ont également à l’égard de l’État.

  • 11 Une démarche est d’ailleurs en cours à cet effet.

39Plusieurs pistes d’approfondissement de ces propositions préliminaires se dégagent. Tout d’abord, les différentes composantes des approches du rôle de l’État pourraient être détaillées, organisées et situées dans la littérature afférente afin de dégager plusieurs conceptions génériques du rôle de l’État. Les interventions critiques propres à l’acceptabilité sociale pourraient être situées au regard des angles de questionnement et de la grille de classement proposés et faire l’objet d’études de cas, ce qui pourrait permettre de dégager des grandes conceptions du rôle de l’État au regard de l’acceptabilité sociale11.

40Aussi, les nuances sémantiques autour de la notion de rôle et les relations entre les différents rôles pourraient être précisées, en les inscrivant plus largement dans la littérature existante notamment en sociologie politique. L’importance relative et les relations entre les facteurs liés à l’État mais aussi au regard des autres facteurs pourraient être plus finement étudiées. Enfin, ces éléments pourraient favoriser la clarification des liens entre les conceptions de l’acceptabilité sociale identifiées au sein des controverses (Batellier, 2015), certains ensembles d’interventions étatiques et diverses conceptions du rôle de l’État.

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Notes

1 Voir la liste que nous en avons dressée dans Batellier, Acceptabilité sociale, cartographie d’une notion et de ses usages. Voir également, au niveau international, la recension des conflits environnementaux autour de grands projets d’EJOLT (Environmental Justice Organisations, Liabilities and Trade), en ligne à http://www.ejolt.org/maps/.

2 Voir Batellier (2015) pour une caractérisation des définitions existantes.

3 Présentation dans le cadre des activités du Collectif scientifique sur la question du gaz de schiste le 27 août 2015, http://www.collectif-scientifique-gaz-de-schiste.com/fr/accueil/index.php/conferences/conferences-collectif/conferences-2015

4 Site web de Strateco – Procédures judiciaires : http://www.stratecoinc.com/fr/20150527-1034-procedures-judiciaires.php, consulté le 12 janvier 2016.

5 Site du Parti libéral du Canada – Engagements électoraux – Évaluation environnementale. En ligne à https://www.liberal.ca/fr/realchange/evaluations-environnementales/

6 Ont été notamment utilisés le dictionnaire ATILF de l’Université de Lorraine, le Larousse en ligne, le dictionnaire terminologique de l’Office de la langue française et le thésaurus de l’activité gouvernementale du Gouvernement du Québec. Pour État, notre échantillon de textes portant sur le rôle de l’État a été mobilisé.

7 Attitude est considérée ici au sens de démarche d’évaluation et de disposition générale à l’égard d’un projet. Elle ne peut être réduite aux comportements, aux réactions ou à l’absence de réaction. Elle a aussi une dimension affective et cognitive intégrant les sentiments, les valeurs, les représentations sociales, etc.

8 La démarche d’observation participante de même que la méthodologie de l’analyse documentaire sont précisées dans Batellier (2015).

9 L’analyse plus détaillée de ces éléments fait l’objet d’une recherche en cours.

10 Pensons, au Québec, aux exemples de Mine Arnaud ou d’Hydrocarbures Québec.

11 Une démarche est d’ailleurs en cours à cet effet.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Pierre Batellier, « Le rôle de l’État au regard de l’acceptabilité sociale des grands projets : quelques repères »Éthique publique [En ligne], vol. 18, n° 1 | 2016, mis en ligne le 09 mai 2017, consulté le 19 mars 2024. URL : http://journals.openedition.org/ethiquepublique/2409 ; DOI : https://doi.org/10.4000/ethiquepublique.2409

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Auteur

Pierre Batellier

Pierre Batellier est doctorant en Sciences de l’environnement à l’Université du Québec à Montréal (UQAM) et chargé de cours en Responsabilité sociale de l’entreprise (RSE) depuis 2009 aux HEC Montréal. Titulaire d’un DESS en gestion (HEC Montréal), d’une maîtrise de l’Institut d’études politiques de Paris et d’un DEA en économie de l’environnement (la Sorbonne), il a travaillé comme consultant et est l’auteur de plusieurs articles et de nombreux cas pédagogiques sur les enjeux de responsabilité sociale des organisations. Il s’intéresse, dans le cadre de ses recherches doctorales, au rôle de l’État au regard de l’acceptabilité sociale au Québec. Il est aussi membre cofondateur de Mobilisation gaz de schiste (2010) et du Collectif scientifique sur la question du gaz de schiste au Québec (2011) ainsi que cofondateur et président de la Coopérative de solidarité les Valoristes (2012).

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