La signification des termes communs et la doctrine de la supposition chez Maître Siger de Brabant
Nous voudrions examiner ici deux problèmes qui ont retenu l'attention de Siger : celui de la signification des termes communs et celui de la supposition des termes au sein d'une structure proposi- tionnelle. Voici les textes que nous comptons utiliser dans cette analyse et qui prouvent l'intérêt permanent que Siger a porté à ces problèmes :
1. Sophisma : ontnis homo de necessitate est animal (vers 1265).
2. Quaestio utrum haec sit vera: homo est animal, nullo homine existente (vers 1265).
3. Quaestiones in tertium de anima (1269).
4. Tractatus de aetemitate mundi (c. III) (vers 1272).
5. Quaestiones logicales (1272, après le De aetemitate).
6. Quaestiones in Metaphysicam (vers 1273)1.
Avant d'entrer en matière il est nécessaire d'indiquer le cadre théorique général à l'intérieur duquel Siger discute les questions concernant le langage. Il n'est pas ce qu'on appellerait aujourd'hui un linguiste; il est un dialecticien et un philosophe. Pour lui, comme pour Aristote et les logiciens scolastiques, l'étude des composants du langage se fait en fontion de l'étude de la proposition énonciative, car c'est en elle que se trouve la vérité2. Ensuite il faut dire qu'il s'intéresse presque exclusivement aux propositions de structure pré-
1 Les cinq premiers écrits seront cités dans nos éditions : B. Bazân, Siger de Brabant. Quaestiones in tertium De anima, De anima intellectiva, De aetemitate mundi, Louvain-Paris, 1972; B. Bazân, Siger de Brabant. Écrits de logique, de morale et de physique, Louvain-Paris, 1974. Le dernier écrit sera cité dans l'édition de C. A. Graiff, Siger de Brabant. Questions sur la Métaphysique, Louvain, 1948.
2 Expliquant la portée du Péri Hermeneias, texte qui a fourni les éléments de base de la réflexion sur la relation entre paroles, pensée et choses, saint Thomas précise : «Sed tamen nomen et verbum magis interpretationis principia esse videntur, quam interpretationes. Ille enim interpretari videtur qui exponit aliquid esse verum vel falsum. Et ideo sola oratio enunciativa, in qua verum vel falsum invenitur, interpretatio vocatur» (In Péri Hermeneias, Prooemium, n. 3).