Revue théologique de Louvain, 17, 1986, 208-212. Emilio BRITO

Deux recueils sur Dieu

Notre époque a multiplié les ouvrages collectifs en tous domaines. Ils demandent certes du lecteur un effort considérable, car ils l'obligent à penser une cohérence comme laissée en suspens. Mais ils sont indispensables : la complexité des savoirs exige le travail à plusieurs. Le théologien s'en rend compte aisément, débordé qu'il est de toutes parts par l'ampleur de sa discipline et par la diversité des méthodes auxquelles elle doit faire appel. Mais même le philosophe le plus convaincu de la nécessité de «penser par soi-même» se contentera aujourd'hui moins que jamais d'être une monade sans fenêtre. Le travail en collaboration est d'autant plus précieux que se trouvent réunies sur un sujet essentiel les différentes tendances de la pensée. Et quelle exploration sera plus essentielle que celle qui se donne (ou reçoit) pour but rien moins que Dieu? Deux ouvrages récents ont eu le courage de s'appliquer à la tâche fascinante mais redoutable de «dire Dieu» aujourd'hui. Le premier1, plus strictement philosophique, est le résultat d'une collaboration plus étroite. Le second2, plus foisonnant, plus varié (faisant appel à la théologie et à l'art aussi bien qu'à la philosophie), mais moins unifié, exhibe tout de même, malgré la diversité des approches, un «ton» commun, effet sans doute de la radicalité de la recherche.

1. La philosophie ne peut pas oublier que Yitinerarium mentis in Deum, bien avant d'aboutir aux «preuves» de l'existence de Dieu, fait partie de l'héritage de la raison occidentale. Ce sont quelques aspects majeurs de cet héritage, et ses tenants et aboutissants contemporains, qui font l'objet propre du présent volume, fruit d'une recherche commune entreprise par des enseignants de la Faculté de philosophie de l'Institut catholique de Paris. Les contributions regroupées dans ce livre exhibent leurs attaches à quelques problématiques typiques du débat contemporain sur Dieu: la problématique de l'onto-théo-logie et de l'idolâtrie conceptuelle, et l'alternative de «Dieu avec l'être» et de «Dieu sans l'être»; la problématique des mots pour le dire, des critères de signification et de vérification du discours sur Dieu; la problématique d'autrui et de l'altérité. Un réseau de noms propres, récurrents au fil des pages, circonscrit ces problématiques: Heidegger, Lévinas en particulier et, à l'arrière-plan, Kant, Hegel, Descartes, saint Thomas.

D'après M. Villela-Petit, la pensée de Heidegger ne rejoint pas une pensée de la création. «Elle est la plus formidable alternative à cette pensée dbnt l'Occident ait été capable» (p. 42). Mais pour celui qui tente aujourd'hui d'approcher la