Ann-Louise SHAPIRO, Breaking the Codes : Female Criminality in Fin-de-Siècle Paris, Stanford, Stanford University Press, 1996.
Texte intégral
1A la fin du XIXe siècle, l'image de la femme criminelle est devenue une obsession nationale en France. Partout on vendait des pamphlets et des gravures relatant ces crimes en détail. Même les journaux en parlaient à loisir. Tout en analysant la criminalité féminine de fin-de-siècle à Paris, Ann-Louise Shapiro raconte des histoires remplies de détails fascinants sur la vie quotidienne, le système judiciaire et la place des femmes dans la société. L'auteur explore plusieurs perspectives distinctes fournies par une grande variété de documents : dossiers policiers et judiciaires, littérature et presse populaire, et quelques fois des lettres intimes. Grâce à ces sources d'information, cet ouvrage a pu reconstituer l'histoire complète et présenter les facettes multiples des crimes et des criminelles. L'auteur s'intéresse surtout à l'importance de la femme criminelle comme symbole des conséquences des grands bouleversements sociaux et culturels du siècle.
2 « L'émergence du `problème' du crime féminin pendant cette période révèle », d'après A-L Shapiro, « deux sortes de tensions culturelles liées entre elles : les nouvelles incertitudes à l'égard de la place de la femme, et des inquiétudes sur la culture de masse moderne » (p. 15). En plus, elle démontre que les branches différentes du monde social et intellectuel sont liées : des théories médico-judiciaires ont influencé la culture populaire et la culture élitiste, et réciproquement. L'auteur montre que la sexualité féminine a fonctionné dans tous ces domaines comme symbole des « problèmes » de l'époque, y compris le féminisme. La criminelle représente cette sexualité déviante.
3Ce livre captivant profite de recherches approfondies, mais il a toutefois quelques faiblesses. D'abord il ressemble trop à d'autres ouvrages récemment parus qui traitent le même sujet, surtout celui de Ruth Harris1. D'une certaine manière le livre de A-L Shapiro est une continuation de ces recherches, mais ses conclusions ne sont pas très innovantes. D'autre part, A-L Shapiro a trouvé des images absolument remarquables de ces femmes, ce qui est tout à fait louable, mais elle ne fait aucune analyse de ces représentations visuelles. L'analyse approfondie des textes rend ce manque d'attention aux sources iconographiques encore plus évident. Les images sont simplement placées dans le livre aux endroits convenables comme illustrations historiques.
4Malgré ces imperfections, ce livre doit être considéré comme important et pour l'histoire des femmes et pour l'histoire culturelle de la Troisième République. Les arguments sont presentés d'une manière convaincante et intéressante. La catégorie de « femme » (et il faut noter l'influence de l'ouvrage de Denise Riley, Am I that name ? Feminism and the Category of « Women » in History2) est primordiale si on veut comprendre les systèmes de pensée de la fin du XIXe siècle. Les journalistes et juges, comme le « public » en général, ont perçu ces femmes à travers leur conception du comportement normal de la femme. Ils sont tous devenus obsédés par ces femmes parce qu'elles représentaient pour eux à la fois les victimes et la cause de la dégénérescence de la société française.
Notes
Pour citer cet article
Référence électronique
Denise Z. Davidson, « Ann-Louise SHAPIRO, Breaking the Codes : Female Criminality in Fin-de-Siècle Paris, Stanford, Stanford University Press, 1996. », Clio [En ligne], 7 | 1998, mis en ligne le 21 mars 2003, consulté le 17 avril 2024. URL : http://journals.openedition.org/clio/359 ; DOI : https://doi.org/10.4000/clio.359
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