Revue des sciences religieuses 79 n° 3 (2005), p. 408-416.

SACRIFIER LA PROMESSE ? Le sacrifice d'Isaac dans la lecture d'Origène

Ce que le Sauveur avait annoncé d'avance à ses disciples en prophétisant en ces termes: «L'heure vient où quiconque vous tuera croira rendre un culte à Dieu» (Jn 16, 2), cela s'est accompli en lui-même pour commencer.

Origène, Commentaire sur s. Jean, V (38, § 235)

Citer la Bible

La théologie, selon le théoricien de la littérature Antoine Compagnon1, est une machine à écrire. Cette image de la machine à écrire - ou du traitement de texte - souligne un certain usage que les Pères de l'Église font du texte biblique comme d'une immense réserve de citations, de manière à produire un texte dans le texte, un texte où la citation résonne et trouve en même temps écho dans d'autres. La théologie ou la pratique hyperbolique de la citation. Pour cette pratique deux conditions sont requises, qui sont aussi deux règles fondamentales. La première est que le texte de départ, les Écritures sacrées, soit un tout délimité, ce qu'on appelle précisément le canon biblique ; tout prélèvement à l'intérieur de cet ensemble reçoit sa force du tout, d'où l'usage exponentiel de la citation biblique. La deuxième condition ou règle veut que le texte révélé soit comme plié, replié en son centre : le régime de la révélation veut en effet que l'Ancien Testament appelle le Nouveau, l'annonce, tandis que le Nouveau, en retour, confirme et éclaire l'Ancien, en dit la vérité.

Soit une question aussi précise que celle de l'infanticide, qui interroge aujourd'hui comme hier le moraliste2. Sur un tel thème, que