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La réforme du système de santé

La réforme du système de santé et les valeurs libérales

Geoffrey Kelley

Résumés

La création d’un système de santé public a été l’un des éléments clés de la Révolution tranquille dans les années 1960 au Québec. Toutefois, le développement de nouveaux traitements et de nouvelles technologies, en particulier des produits pharmaceutiques, ont fait naître un nouveau débat sur la gestion de notre système de santé. En se basant sur une analyse récente des valeurs libérales dans la société québécoise par Claude Ryan, l’auteur souligne l’importance que le gouvernement doit accorder à ces valeurs dans la modernisation de notre système de santé. À la lumière des recommandations présentées par la commission Clair au provincial et par la commission Romanow au fédéral, la situation se prête bien à une modernisation du système de soins au Québec. Les valeurs libérales ont fourni une base au système de santé public ; elles sont plus pertinentes qu’elles ne l’ont jamais été alors que le débat sur notre système de santé est engagé.

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Texte intégral

  • 1 Commission sur l’avenir des soins de santé au Canada, Guidé par nos valeurs. L’avenir des soins de (...)

1L’établissement d’un système public de santé et de services sociaux est généralement considéré comme la plus grande réalisation des gouvernements canadiens successifs. La faculté de médecine de l’université McGill a récemment illustré l’importance que les Canadiens accordent à ce système en déclarant devant la commission Romanow que « l’assurance-santé [sic] est un emblème aussi fort au Canada que la Constitution l’est aux États-Unis1 ». L’histoire de l’implantation de l’assurance maladie de même que le courage de pionniers tels que Emmett Hall et Tommy Douglas de la Saskatchewan sont souvent évoqués pour démontrer la différence entre les Canadiens et leurs voisins du sud.

2La mise sur pied d’un État providence s’est accélérée après la deuxième guerre mondiale. Le gouvernement fédéral, à l’aide des ressources humaines et financières alors disponibles, a mis en place, dans le but de gérer plus efficacement le retour des soldats et la transformation de notre économie en une économie de temps de paix, plusieurs programmes sociaux pour faire face aux problèmes aigus qui auraient pu apparaître. Les programmes de retour aux études et d’achat de maisons abordables sont nés de cette volonté d’éviter le chômage et l’instabilité politique qui avaient marqué le début des années 1920 au Canada.

3Pour le Québec du début des années 1960, le défi de l’implantation d’un système public de santé était double : il s’agissait de transformer le système existant en un système public et de s’assurer de la prépondérance du rôle du gouvernement du Québec dans la supervision et la gestion du système face à la présence accrue du gouvernement fédéral dans ce secteur. Cette transformation était l’un des éléments clés de la Révolution tranquille et de la modernisation de l’État québécois. Pour le gouvernement de Jean Lesage, la réforme du système de santé était ancrée dans les valeurs libérales, entre autres, dans le souci de l’égalité des chances et de la justice sociale, et ce dans un contexte de multiplication des services de santé.

  • 2 C. Ryan, Les valeurs libérales et le Québec moderne, Montréal, Parti libéral du Québec, 2002, p. 12
  • 3 Ibid., p. 30.
  • 4 Ibid., p. 12.

4Dans une publication récente, l’ancien chef du Parti libéral du Québec, Claude Ryan, a rappelé le rôle de ces valeurs dans la création du Québec moderne. Il a souligné l’importance de la personne, de la protection de la liberté individuelle et de l’épanouissement personnel comme la fin première de l’action politique2. Mais il faut tempérer cet enthousiasme pour la personne par un souci pour la justice sociale, car « une société où l’accent serait mis exclusivement sur l’exaltation des valeurs individuelles deviendrait vite une société égoïste3 ». Claude Ryan a rappelé le mot d’ordre d’un autre chef libéral, George-Émile Lapalme, qui avait déclaré que, « être libéral, c’est être socialement juste4 ».

  • 5 Ibid., p. 32-33.

5Le débat sur l’assurance hospitalisation (1962) et l’assurance maladie (1970) ont donné l’occasion de mettre les valeurs libérales en pratique. Comme plusieurs pays occidentaux, le Québec voulait rendre toutes les personnes égales devant la maladie de même que protéger la personne et sa famille contre les effets d’une crise reliée à la santé. Claude Ryan a rappelé qu’« il fallait naguère s’en remettre au dévouement des communautés religieuses et des professionnels de la santé, en particulier des médecins, pour veiller à ce que les personnes à revenu modeste bénéficient de soins médicaux ou hospitaliers. Les personnes de condition modeste étaient particulièrement désavantagées par ce régime. Des situations d’endettement écrasant en découlèrent dans des milliers de foyers5. » Afin d’assurer une plus grande équité et pour promouvoir la justice sociale, le gouvernement du Québec a adopté le régime d’assurance hospitalisation et le régime d’assurance maladie.

6Il est important de rappeler les origines de notre régime public de santé, car la question de l’avenir de notre système et la façon de le réformer sont à l’ordre du jour dans tout le Canada. Plusieurs provinces ont mis sur pied des commissions pour examiner leur système de santé, y compris le Québec (le rapport Clair, 2000), l’Alberta (le rapport Mazankowski, 2001) et la Saskatchewan (rapport Fyke, 2001). Au palier fédéral, le gouvernement a créé la Commission sur l’avenir des soins de santé au Canada, présidée par Roy Romanow. Le Sénat canadien a également publié ses réflexions en cinq tomes sous le titre La santé des Canadiens, à la suite des travaux d’un comité présidé par le sénateur Michael Kirby. De toute évidence, la réforme du système de santé est nécessaire.

7Mais pourquoi est-ce que notre société doit réexaminer le système de santé ? D’où vient le sentiment de crise et de perte de confiance en notre réseau public de soins ? Il est très difficile de fournir une réponse simple à cette question fort complexe, mais un constat se dégage. En raison de l’évolution des technologies et des traitements, notamment dans le domaine de la pharmacologie, et du virage ambulatoire, notre système est devenu incomplet et n’est pas adapté aux besoins de la médecine moderne. Un système conçu principalement pour défrayer les médecins et le fonctionnement des hôpitaux ne correspond pas aux exigences d’aujourd’hui.

  • 6 Cette situation a même provoqué des abus, car certains hôpitaux ont exigé que le malade se procure (...)

8L’exemple des médicaments illustre bien les difficultés auxquelles doit faire face le réseau de la santé. L’industrie pharmaceutique a mis au point un éventail intéressant de médicaments pour le traitement plus efficace des maladies ou pour le soulagement de la douleur, ce qui améliore la qualité de la vie des malades. La chirurgie d’un jour ou la chirurgie ne nécessitant qu’une courte hospitalisation sont de plus en plus courantes. Mais ces changements ont créé des anomalies dans le système. Par exemple, alors que les coûts des médicaments lors d’un séjour hospitalier sont couverts par le système de l’assurance maladie, ils sont assumés par le malade dès qu’il retourne à la maison6. Avant la création du régime d’assurance médicaments, en 1996, seuls les individus couverts par un régime d’assurance privée offert par leur employeur ou les assistés sociaux et les personnes âgées avaient une protection en ce qui concerne les médicaments utilisés à l’extérieur de l’hôpital.

9Malgré un système dit « universel », certaines personnes sont obligées d’assumer les coûts de leur traitement médical. La création d’un régime public d’assurance médicaments par le gouvernement du Québec n’a pas réglé tous les problèmes liés aux coûts des médicaments, car il n’a pas tenu compte de l’augmentation annuelle du coût (de 15 % à 20 %). Ces coûts ont augmenté parce que le régime public compte un nombre plus important de clients à risque (les personnes âgées, les personnes en milieu défavorisé) comparativement à la clientèle assurée par le secteur privé (notamment les salariés avec un régime privé comme bénéfice social).

  • 7 Vérificateur général, Rapport à l’Assemblée nationale pour l’année 2000-2001, t. II, chap. 6, « Les (...)

10De plus, le régime d’assurance maladie ne couvre pas certains services médicaux ou ne les couvre que partiellement. Les centres locaux de services communautaires organisent des soins à domicile pour les personnes qui souhaitent demeurer chez elles plutôt que d’être hospitalisées ou d’être hébergées dans le réseau des établissements de soins de longue durée. Mais, selon le bureau du vérificateur général du Québec, il y a beaucoup de variations entre les services disponibles dans chaque région, les délais d’attente et les outils diagnostiques employés pour évaluer les besoins7.

  • 8 Ibid., t. I, chap. 5, « Les services d’imagerie médicale ».

11Les outils diagnostiques ont évolué et constituent une autre zone grise où se retrouvent services privés et services publics. Souvent, en raison de la lenteur du système public à effectuer les examens médicaux requis comme les radiographies, l’imagerie médicale et les tests sanguins, un marché privé s’est développé notamment pour les examens préventifs et les situations non urgentes. Les organismes gouvernementaux, notamment la Commission de la santé et la sécurité du travail et la Société d’assurance automobile du Québec, font appel aux cliniques privées lorsqu’ils ont besoin rapidement des résultats d’examen des personnes accidentées touchant des indemnités. Ce comportement est logique lorsque l’on constate la longueur des listes d’attente pour certains examens. Le vérificateur général du Québec a d’ailleurs souligné une grande variation dans la disponibilité des examens entre les diverses régions du Québec8. En raison du délai pour certains examens, il n’est pas surprenant donc que les personnes qui le peuvent payent pour ces services plutôt que de vivre dans l’insécurité causée par l’attente d’un diagnostic dans plusieurs mois.

  • 9 Commission d’étude sur les services de santé et les services sociaux, Les solutions émergentes. Rap (...)

12Le rapport Clair explique fort bien la conséquence : « Avec le temps, il en résulte que le citoyen perçoit de moins en moins bien la cohérence du panier de services assurés. En principe, ce panier est très large mais, en pratique, les budgets limités et les délais d’attente font en sorte que certains services sont parfois peu accessibles. Formellement, les citoyens et les politiciens rejettent la création d’un système à « deux vitesses ». En pratique, les ressources trop limitées pour un panier de service large, mal défini et souvent peu cohérent, favorisent la confusion et le développement de zones grises9

  • 10 Rapport Romanow, op. cit., p. 5.

13La complexité de la question du financement de l’ensemble des soins de santé au Canada, incluant les soins dentaires, est également reflétée dans l’analyse qu’en fait le rapport Romanow. En 2001-2002, 42,4 % des dépenses de santé (44 milliards) ont été consacrées aux services visés par la loi canadienne sur la santé. Le coût des services assumés par les provinces, notamment les soins à domicile, les soins de longue durée et les régimes d’assurance médicaments, s’élève à près de 26 milliards soit 25,2 % de l’ensemble. Finalement, 33 milliards, 32,4 % des coûts, sont assumés individuellement ou par des régimes privés d’assurance10.

  • 11 Rapport Clair, op. cit., p. 173.
  • 12 Rapport Romanow, op. cit., p. 64.

14Devant la transformation de l’offre des soins médicaux et la complexité du système, il n’est pas surprenant qu’on ait perdu de vue le citoyen. Il se plaint d’être obligé de verser des impôts plus élevés alors que ses besoins médicaux ne sont pas toujours couverts par l’assurance publique. Il faut noter que les rapports Clair et Romanow ont analysé cet état des choses. Le premier a proposé une politique cadre de partenariat avec le secteur privé et le tiers secteur afin « d’accélérer les investissements nécessaires à l’adaptation des services aux nouvelles réalités et d’améliorer l’accessibilité aux services pour tous, sans égard à leur revenu11 ». Le rapport Romanow, quant à lui, suggère l’actualisation de la loi canadienne sur la santé « en accroissant la liste des services de santé assurés de telle sorte qu’elle ne se limite pas aux services hospitaliers et médicaux, mais qu’elle englobe immédiatement les services de soins à domicile ciblés, puis, ultérieurement, les médicaments d’ordonnance et/ou en clarifiant la question de la couverture en ce qui concerne les services diagnostiques12 ».

15Ce réexamen du panier de services est essentiel si l’on veut protéger notre régime de santé public. La croissance des services peu ou pas assurés, tels que les médicaments et les soins à domicile, de même que la performance parfois inquiétante du système public, notamment dans la prévention et les services diagnostiques, ont compromis le principe d’une accessibilité universelle aux soins de santé. Pour préserver l’égalité des chances et pour renforcer notre engagement en faveur de la justice sociale, il faut réformer le système afin de limiter l’effet de la capacité de payer de l’individu sur les soins auxquels il a accès.

16Cela ne nous empêche pas de recourir aux services offerts par le secteur privé. Toutefois, la gestion et la fourniture des services à la population devraient demeurer sous la gouverne de l’administration publique. Les établissements existants qui sont reconnus comme « privés-conventionnés » sont la preuve du potentiel que représente le partenariat entre les secteurs privé et public en ce qui concerne les soins. Mais, en règle générale, le principe d’un payeur unique (le gouvernement) et de l’accès universel s’applique à l’ensemble de la population (tout le monde peut inscrire son nom sur les longues listes d’attente).

  • 13 C. Ryan, op. cit., p. 11.
  • 14 Rapport Romanow, op. cit., p. 67.

17Une autre valeur libérale rappelée par Claude Ryan est l’importance du débat public dans notre société. « Être libéral en politique […] c’est notamment être ouvert aux valeurs de changement et du progrès ; mettre au premier rang les valeurs de liberté et de démocratie, être acquis à la discussion publiques des enjeux et à la transparence de l’administration de la chose publique13. » Cette valeur a trouvé un écho dans le rapport Romanow par l’ajout d’un sixième grand principe dans la loi canadienne sur la santé, celui de l’imputabilité14. Les cinq autres grands principes sont la gestion publique, l’universalité, l’accessibilité, la transférabilité et l’intégralité.

18Sans approuver toutefois les mécanismes d’imputabilité proposés par Roy Romanow, qui prévoient un rôle accru pour le gouvernement fédéral en matière de santé et qui entraîneront sans nul doute un large débat sur le fédéralisme, le principe d’une plus grande transparence et imputabilité dans la gestion de notre réseau de santé est incontournable. Pour rétablir des liens de confiance avec le citoyen, pour assurer une gestion serrée des fonds publics destinés aux services de santé et services sociaux, il faut poursuivre un débat public.

  • 15 ICIS, Les soins de santé au Canada, 2002, sur le site www.ICIS.ca.

19Quelques outils sont déjà en place à cette fin. L’Institut canadien d’information sur la santé (ICIS), fondé en 1994, a publié des données et des résultats d’analyses comparatives sur les soins de santé au Canada. Ces résultats, publiés pour informer les personnes qui ne sont pas des profanes du domaine de la santé, sont accompagnés de tableaux et de graphiques. L’ICIS constitue donc un bon point de départ pour le citoyen, ou même pour le député, qui veut s’informer davantage15.

20Au Québec, le ministère a commencé à émettre des bulletins de performance sur nos hôpitaux et plus récemment sur nos centres locaux de services communautaires. Cet outil est matière à controverse parce que son analyse se limite à peu d’indicateurs de performance, ce qui a pour effet de raviver le débat public sur nos établissements de santé.

21L’Agence sur l’évaluation des technologies médicales offre des analyses plus détaillées des nouvelles technologies et des méthodes d’intervention. L’institut de la santé publique et les directions de la santé publique des régies régionales de la santé et des services sociaux constituent également des sources importantes d’information.

22Les rapports biannuels du bureau du vérificateur général du Québec me sont utiles, en tant que parlementaire, parce qu’ils sont un outil essentiel pour une meilleure compréhension de ce qu’est la gestion efficace de notre système de santé. En effet, depuis quelques années, ils comprennent au moins un chapitre consacré à cette question. Les rapports biannuels du vérificateur général du Québec sont déposés à l’Assemblée nationale et ensuite référés à la Commission de l’administration publique (CAP).

  • 16 Commission de l’administration publique, 5 mai (les services sociaux offerts aux jeunes) et 19 mai (...)

23La Commission convoque par la suite le sous-ministre de la Santé et des Services sociaux pour que ce dernier rende compte de la gestion du système et fournisse aussi des solutions visant à corriger le tir en fonction des recommandations du vérificateur général. La CAP s’est penchée, au cours de neuf séances, sur la gestion du ministère, entre autres, en matière de services d’hébergement et de services de soins à domicile, en matière de laboratoires médicaux et de services préhospitaliers d’urgence16. De plus, la CAP s’est également penchée sur le programme volontaire de départ ayant entraîné le départ massif de plus de mille quatre cents médecins ainsi que de quatre mille infirmières et créé ainsi des pénuries importantes de main-d’œuvre dans ce secteur.

  • 17 Vérificateur général du Québec, Rapport à l’Assemblée nationale pour l’année 1998-1999, vol. II, ch (...)

24Les audiences de la CAP sont à l’origine des quarante-six recommandations des députés représentant deux formations politiques, le PLQ et le PQ. Le vérificateur général a dressé un portrait qui témoigne des difficultés du réseau. Il a constaté un manque de coordination entre le ministère, les régies régionales et les établissements de santé ; une absence de planification informatique ayant compliqué la gestion du réseau en raison de langages informatiques différents ; des différences régionales préoccupantes dans l’offre et l’accès aux soins de santé ainsi que dans les délais. Mais surtout, le vérificateur général a souligné l’absence d’une vue d’ensemble et de précisions en ce qui concerne qui fait quoi dans le réseau de la santé. Mentionnons, par exemple, le manque de planification et de coordination pour l’achat d’équipement d’imagerie qui a pour conséquence la sous-utilisation d’équipement coûteux, selon le vérificateur général17.

25Bref, il y a déjà des forums pour les débats publics sur l’avenir de notre système de santé. Il est maintenant du devoir des spécialistes, des élus et des citoyens, de poursuivre ces débats sur le système de santé, comme nous ont invités à le faire les commissions Clair et Romanow.

  • 18 Parti libéral du Québec, Partenaires pour la santé, Québec, 2003, p. 105-112.

26La question de l’avenir de notre système de santé sera abordée de nouveau lors de la prochaine campagne électorale étant donné que le Parti libéral du Québec a proposé la création d’un commissaire à la santé et à l’élaboration de la charte des droits et des responsabilités des personnes malades. L’objectif de ces démarches est clair. « À terme, le réseau de la santé sera plus souple et plus transparent et le citoyen en sera non seulement le bénéficiaire, mais le patron18

27En guise de conclusion à sa réflexion sur les valeurs libérales, Claude Ryan a souligné que les valeurs sont toujours d’actualité. Les débats sur la gestion du système de santé constituent le moyen privilégié pour mettre à l’épreuve certaines valeurs libérales. La nécessité de redéfinir les rôles respectifs de tous les intervenants nous oblige à nous pencher sur le rôle du secteur privé et de sa relation avec l’ensemble du réseau et l’offre des services. Le principe de l’égalité des chances et de l’universalité de notre système demeure actuel. Il faut reconnaître que le secteur privé joue un rôle important et jouera un rôle important dans l’avenir. Mais il faut s’assurer que la capacité de payer de la personne ne compromet pas sa santé et celle de sa famille.

28La réforme de la santé devrait se faire dans un souci de justice sociale. Il suffit de se pencher sur la carte de l’île de Montréal que la direction de la santé publique vient de publier sur l’espérance de vie par territoire des centres locaux de services communautaires pour saisir l’ampleur de cet enjeu. En effet, l’on peut constater des écarts de dix ans de vie entre les citoyens des quartiers défavorisés et des quartiers mieux nantis. Il faut tenir compte de ces écarts dans l’attribution des ressources, notamment en ce qui a trait à la prévention.

29Finalement, nous sommes tous interpellés à participer aux débats sur l’avenir de notre système de santé, en vue d’une plus grande transparence et de l’accès aux renseignements nécessaires afin d’évaluer le fonctionnement du système et sa performance. Nous devons aussi réfléchir aux enjeux éthiques complexes notamment en ce qui a trait à l’utilisation des ressources limitées et à l’expansion des coûts reliés aux nouvelles technologies et façons de faire. Le rôle des comités d’éthique et de déontologie sera encore plus pertinent que jamais au cours des années à venir.

30On fait souvent l’erreur de dire que notre système de santé est gratuit. La réalité est tout autre. Nous avons l’obligation de soutenir le système en tant que contribuables avec nos contributions financières et en tant que citoyens et bénévoles avec nos gestes, cela dans le but d’assurer la qualité de vie des familles et de nos concitoyens. Dans le contexte d’un système en pleine évolution, nous avons un rôle indispensable à jouer en tant que citoyens afin de contribuer aux réformes de notre système de santé.

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Notes

1 Commission sur l’avenir des soins de santé au Canada, Guidé par nos valeurs. L’avenir des soins de santé au Canada. (rapport Romanow), Ottawa, 2002, p. 49.

2 C. Ryan, Les valeurs libérales et le Québec moderne, Montréal, Parti libéral du Québec, 2002, p. 12.

3 Ibid., p. 30.

4 Ibid., p. 12.

5 Ibid., p. 32-33.

6 Cette situation a même provoqué des abus, car certains hôpitaux ont exigé que le malade se procure ses propres médicaments à l’extérieur de l’hôpital, aux frais de son assurance médicaments. Cette pratique a permis certaines économies pour les hôpitaux, mais s’est également méritée une lettre de réprimande de la ministre de l’époque, Pauline Marois, qui a ordonné à tous les hôpitaux de mettre fin à cette pratique.

7 Vérificateur général, Rapport à l’Assemblée nationale pour l’année 2000-2001, t. II, chap. 6, « Les services à domicile relevant du réseau de la santé et des services sociaux ».

8 Ibid., t. I, chap. 5, « Les services d’imagerie médicale ».

9 Commission d’étude sur les services de santé et les services sociaux, Les solutions émergentes. Rapport et recommandations (rapport Clair), Québec, 2000, p. 164.

10 Rapport Romanow, op. cit., p. 5.

11 Rapport Clair, op. cit., p. 173.

12 Rapport Romanow, op. cit., p. 64.

13 C. Ryan, op. cit., p. 11.

14 Rapport Romanow, op. cit., p. 67.

15 ICIS, Les soins de santé au Canada, 2002, sur le site www.ICIS.ca.

16 Commission de l’administration publique, 5 mai (les services sociaux offerts aux jeunes) et 19 mai 1999 (les services préhospitaliers d’urgence), 8 février (les laboratoires de biologie médicale), 5 avril (la coordination de la recherche en santé et de la recherche sociale) et 14 septembre 2000 (les répercussions sociales et économiques liées aux jeux de hasard et d’argent), 31 octobre (la gestion des activités de recherche réalisées dans les centres hospitaliers dotés d’un centre de recherche), 14 novembre 2001 (les services d’imagerie médicale), 23 octobre (les services à domicile relevant du réseau de la santé et des services sociaux) et 6 novembre 2002 (les services d’hébergement offerts aux personnes en perte d’autonomie).

17 Vérificateur général du Québec, Rapport à l’Assemblée nationale pour l’année 1998-1999, vol. II, chap. 2, « Les laboratoires de biologie médicale », et Rapport à l’Assemblée nationale pour l’année 2000-2001 , vol. I, chap. 5, « Les services d’imagerie médicale ».

18 Parti libéral du Québec, Partenaires pour la santé, Québec, 2003, p. 105-112.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Geoffrey Kelley, « La réforme du système de santé et les valeurs libérales »Éthique publique [En ligne], vol. 5, n° 1 | 2003, mis en ligne le 07 avril 2016, consulté le 28 mars 2024. URL : http://journals.openedition.org/ethiquepublique/2168 ; DOI : https://doi.org/10.4000/ethiquepublique.2168

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Auteur

Geoffrey Kelley

Geoffrey Kelley est président de la Commission de l’administration publique du Québec.

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Droits d’auteur

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