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L'Écart des deux Wittgenstein comme discours

Published online by Cambridge University Press:  01 June 1971

Roger Lapointe
Affiliation:
Université Saint-Paul, Ottawa

Extract

La distinction de deux Wittgenstein est-elle mythique, ainsi que le voudrait R. J. Bernstein? Mythe créé involontairement par un penseur aussi peu mythomane que possible, B. Russell, quand, dans sa préface au Tractatus, il assigna à l'auteur l'intention d'établir les « conditions d'un langage logiquement parfait ». Prenant le contre-pied d'un Wittgenstein-I lancé à la poursuite d'un langage idéal, Wittgenstein-II aurait, dans Investigations philosophiques, opéré un retour au langage naturel et au sens commun.

Il est sans doute possible d'exagérer la distance qui sépare le Tractatus des Investigations philosophiques (dorénavant dénotés par T et IP). Mais on ne saurait la nier. Quelques rétractations expresses enregistrées dans le second ouvrage nous en empêcheraient (par exemple IP 23, 46, 97, 114). Le problème est plutôt de déterminer l'ampleur et la nature de la transformation, de la mesurer.

Type
Articles
Copyright
Copyright © Canadian Philosophical Association 1971

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References

1 “Wittgenstein's Three Languages”, dans Copi, I. M. et Beard, R. W. éd. Essays on Wittgenstein's Tractatus, Londres 1966, p. 234Google Scholar; J. Garelli ne départage pas les deux Wittgenstein et accuse dés lors le second d'incohérence, cf. “Wittgenstein et l'analyse du langage”, Les temps modernes 18 (1963) 22692278.Google Scholar

2 Cf. Wittgenstein, L., Tractatus logico-philcsophicus, survi de Investigations philosophiques, trad, parKlossowski, P. (Bibliothéque des idées) Paris 1961, p. 8.Google Scholar

3 C'est à peu prés l'opinion de Daly, C. B.“New Light on Wittgenstein”, Phil. Stud. 10 (1960) 33CrossRefGoogle Scholar. Mais, G.E.M. Anscombe nie que le progrés de Wittgen-stein-I á Wittgenstein-II ait consisté à découvrir le langage naturel, cf. An Introduction to Wittgenstein's Tractatus, Londres 1959, pp. 9192Google Scholar. A. G. Gargani pense de meme et il ne croit pas non plus au mythe dont fait état Bernstein, R. J.. “Sostanzialmente corretta rimane perció l'interpretazione russelliana che da una parte insiste sulla tematizzazione di un linguaggio ideale da parte del filosofo austriacoe dall'altra stabilisce la condizione di significanza e di legittimità del linguaggio comune nella sua conformità ai criteri e alle regole del primo.” {Linguaggio ed esperienza in Ludwig Wittgenstein, Florence 1966, P. 92).Google Scholar

4 “Every concept... will be expressed by exactly one word.” (1984)

5 Cf. art. cit, p. 12.

6 Cf. Les Mots et les choses, Paris 1966. Dans un ouvrage ultérieur, L'Archéologie du savoir, Paris 1969, Foucault revient sur le sujet pour souligner le caractére historique (non formel) de ses conclusions (cf. p. 168), ainsi que leur portée relative (non totalitaire) (cf. pp. 193–194, 206–207).

7 Voir An Introduction to Wittgenstein's Tractatus, Londres 1959, pp. 64–86.

8 Voir C. B. Daly art. cit., pp. 15–26; et plusieurs des articles réunis par I. M. Copi et R. W. Beard dans Essays on Wittgenstein's Tractatus cité plus haut.

9 Le statut ontologique des objets chez Wittgenstein est un sujet fort débattu. D'accord avec D. Keyt et A. G. Gargani, je croirais, contre I. M, Copi et W. Sellars qui rattachent l'objet aux individus concrets, que l'objet s'apparente plutot aux formes platoniciennes (cf. D. Keyt, “Wittgenstein's Notion of an Object”, dans Essays on Wittgenstein's Tractates, p. 295) et qu'il posséde propriétés formelles (cf. A. G. Gargani op. cit., p. 103). Autrement dit, il ressortit davantage à la pensée qu'aux faits.

10 A l'instar de Frege, semble-t-il, Wittgenstein distingue sens (Sinn) et référence (Bedeutung). C'est du moins ce que déclare G.E.M. Anscombe (op. cit., p. 17), qui reproche à la traduction anglaise de Ogden d'oblitérer cette importante distinction en rendant Bedeutung par meaning (par exemple en T.4. 023). Je crois qu'en français, il vaudrait mieux traduire Bedeutung par ‘signification’ plutôt que par ‘référence’, vu que ce dernier terme vise la réalité extra-linguistique, alors que la Bedeutung selon Wittgenstein se rapporte directe-ment aux objets.

11 Le rôle que Wittgenstein assigne aux objets me paraît assez proche de celui que A. N. Whitehead leur fait jouer dans son propre systéme. Chez Whitehead aussi, les objets, notamment les objets éternels, déterminent par leurs arrangements la possibilité des entités actuelles, cf. Parmentier, A.La Philosophic de Whitehead et le probléme de Dieu (Bibliothéque des Archives de philosophic 7) Paris 1968, pp. 6972, 297–346.Google Scholar

12 Cf. art. tit., p. 236.

13 Lors du XIII congrés des Sociétés de philosophic de langue française, J. Hyppolite a rappelé quelques propos de Tarski et de Hjelmslev dans ce sens, cf. Le langage II (Langages) Neuchâtel 1967, p. 52.

14 Voir par exemple Roure, M.-L.Logique et méalogique (Problémes et doctrines), Lyon 1957, p. 66.Google Scholar

15 Cf. “Some Problems Connected with Language”, dans Essays on Wittgen-stein's Tractatus, pp. 101–103.

16 Voir A. G. Gargani op. cit., p. 333.

17 W. Sellars parle d'inférence en rapport avec la facon ni assertive ni référentielle dont T thématise l'ineffabilité, cf. “Naming and Saying”, dans Essays on Wittgenstein's Tractates, p. 270.

18 “Language, therefore, does not have to point at things”. (Wittgenstein's Definition of Meaning as Use (The O. Brownson Series 6), New York 1967, p. 37)Google Scholar

19 “It simply is not true that every word either needs or has a referent. We are free to use words in any number of ways, and we do...” (ibid., p. 39)

20 Cf. op. cit., pp. 87–88.

21 Cf. “Le langage et l'expérience humaine”, dans Problémes de langage (Coll. Diogéne), Paris 1966, pp. 313.Google Scholar

22 Voir “La forme et le sens dans le langage”, dans Le Langage II (Langages), Neuchatel 1967, pp. 2940.Google Scholar

23 Ibid., p. 36.

24 “La structure, le mot, l'événement”, Esprit 35/5 (1967) 801–821.

25 Cf. art. cit., pp. 15–16.

26 Cf. Le Langage II, pp. 41–43, 46.

27 Cette découverte du discours s'accompagnait d'une découverte de la langue en tant que distincte du discours, et plus profondément, d'un e redécouverte de la langue quant à la relative autonomie de ses structures face au réel et à la pensee, cf. là-dessus François, F., “Le langage et ses fonctions”, dans Le langage (Encyclopédic de la Pléiade), Paris 1968, pp. 319, spéc. pp. 10–15.Google Scholar - Voir Kerr, F.“Language as Hermeneutic in the Later Wittgenstein”, Tijd. voor Fil. 27 (1965) 491520Google Scholar: “One way to focus what Wittgenstein has achieved would be to say that the shift from conceiving language as merely a system of signs to understanding language as hermeneutic [comme chez Heidegger] may also be put in terms of the shift performed by Wittgenstein from concentration in the relationship between words and things to concern with the relationship between words and context”, (p. 510)

28 Outre les fonctions infra et métalinguistiques, d'autres pourraient être considérées. Par exemple, la fameuse triade de Bühler : représentation, expression, appel. Mais ici encore, les linguistes sont à pied d'œuvre et ni le partage de Bühler, ni celui de Jakobson n'ont fait l'unanimité. Voir François. F, loc. cit.; Mounin, G., Clefs pour la linguistique, Paris 1968, p. 80.Google Scholar

29 Voir Introduction, pp. 19–20.

30 S. Cavell classerait le style de IP parmi les “confessions”, cf. “The Availability of Wittgenstein's Later Philosophy”, The Phil. Rev. 71 (1962) 9193Google Scholar. Le reste de l'article (pp. 67–91) est un e discussion de l'ouvrage de D. Pole, The Later Philosophy of Wittgenstein, Londres 1958, ouvrage que Cavell jug e “not useful” (p. 69).