Revue des sciences religieuses 69 n° 4 (1995), p. 463-480

UECBASIS CAPTIVI ET LA QUERELLE DES INVESTITURES *

Depuis sa publication par Jacob Grimm, en 1838, le poème latin médiéval intitulé Ecbasis cuiusdam captivi per tropologiam, épopée animale ancêtre du Roman de Renaît, a fait l'objet de longues recherches en vue de le situer dans l'espace et le temps (1). Après un siècle et demi d'approximations, sur le Xe et le XIe siècle, un consensus semble envoie de s'instaurer en faveur de l'hypothèse avancée en 1964 par Karl Heinz Thomas : l'œuvre aurait été composée à Trêves, entre 1087 et 1101Npar un moine lorrain, qui avait appartenu au monastère de Saint-Èvre de Toul (2).

Or, la dernière décennie du XIe siècle marque le paroxysme de la Querelle des investitures et de la lutte sans merci engagée par le roi Henri IV (1056-1106) contre la papauté, et il n'est pas exagéré de dire que, jusqu'au concordat de Worms (1 122), l'archevêché de Trêves constitua l'un des bastions les plus fermes de la résistance germanique au mouvement de la réforme grégorienne. En lutte avec les archevêques de Mayence et de Cologne pour des questions de préséance, ceux de Trêves comptaient d'autant plus sur la faveur royale qu'ils avaient affaire, dans leur propre diocèse, à des forces divergentes, à des groupes de pression, qu'il ne leur était pas facile de neutraliser (3). Après le chapitre de la cathédrale, toujours attentif à faire valoir ses droits et à marquer sa différence, l'avouerie et la