DE BAIUS A JANSÉNIUS : LE « COMMA PIANUM »
Lorsque, en 1550 et 1554, ils reçurent le doctorat en théologie et commencèrent à enseigner à Louvain, Michel Baius (1513-1589) et Jean Hessels (1522-1566) ne pouvaient pas ne pas chercher les causes des progrès incroyables de la Réforme qui allait bientôt séparer de Rome une grande partie des dix-sept provinces des Pays-Bas (1). Il leur parut qu'une des principales consistait, non dans le fond de la doctrine, mais dans la manière de l'exprimer : les protestants ne cachaient pas leur dégoût de la terminologie artificielle des seolasti- ques et ne voulaient écouter que les expressions de l'Ecriture et des Pères (2). Convaincus que, sur ce terrain aussi, les catholiques gardaient l'avantage, les jeunes professeurs s'assignèrent pour idéal une fidélité, aussi littérale que possible, au langage des premiers siècles de l'Eglise, et surtout — puisque c'était lui qui avait traité avec le plus de profondeur les questions alors brûlantes et à qui les novateurs se référaient avec prédilection — à celui de saint Augustin.
(1) Souvent affirmées par lui, les préoccupations majeures de Baius sont illustrées par les titres des opuscules qu'il a publiés de 1563 à 1566 : tous portent sur les questions qui divisaient le plus les théologiens des deux confessions.
(2) Ils professaient « non modo cum Scripturis et Patribus sentien- dum, sed et loquendum, quo eatholicae veritatis his temporibus doeeri pos- sent et defendi contra Haereticos qui Scholae phrases abhorrebant, nec aures praebere volebant nisi Scripturae ac Patrum locutionibus » (Baiana dans M. Bail... Opera, publication de dom G. Gerberon qui porte : Cologne, 1696, p. 76 ; cf. aussi les pp. 79, 124 sq. dont on trouvera la traduction dans F. X. Jansen, Baius et le baianisme, Essai théologique, Louvain, 1927,, p. 155.
