L'HELLÉNISME A SALAMINE DE CHYPRE

S'attacher à cette étude n'est pas seulement céder à la passion née d'une rencontre et de vingt campagnes de fouille1. Le cas de Salamine de Chypre peut sembler, à juste titre, exemplaire, expression d'un hellénisme original que les vicissitudes de l'histoire ne firent que diversifier sans l'offusquer jamais. Exemplaire à cause de sa situation géographique : face à la côte syrienne, Salamine est la dernière cité de l'Occident, porte ouverte sur l'immensité et les richesses de la vieille Asie (fig. 1). Dans une île que la nature a mal pourvue en installations portuaires, sur la Méditerranée orientale la plus démunie de ports, l'embouchure d'un fleuve, la présence d'un bassin que protégeait une longue barre rocheuse, l'élévation, même réduite, d'un cap dominant la mer fournissaient aux Grecs le port et l'acropole, site idéal à leur gré pour une installation urbaine2. Exemplaire aussi par la tradition littéraire qui la concerne, Salamine fut le théâtre de grands événements que les historiens Hérodote, Diodore ont longuement rapportés3; Isocrate surtout a consacré trois discours au roi Évagoras et à sa famille4; le panégyrique du souverain qui régnait sur la cité à la fin du ve siècle et au ive siècle, joint à l'écho de ses actions dans la politique athénienne, apporte une suite précieuse de renseignements sur la ville de l'époque classique, sur les origines aussi telles que les hommes du ive siècle aimaient à s'en donner l'image5. Exemplaires enfin par l'ampleur et la diversité de l'exploration archéologique : sans doute ni la grande cité ni l'immense nécropole ne sont reconnues dans leur totalité6 (fig. 2); dans la nécropole les incursions des frères Cesnola au