CHRONIQUE DE THÉOLOGIE DOGMATIQUE

L'ÉLECTION DE JÉSUS-CHRIST D'APRÈS KARL BARTH

Le volume de la Dogmatik de Barth qui expose la doctrine de la prédestination est le plus surprenant et le plus passionnant. Paradoxe inouï : l'auteur part des thèses calvinistes, il les expose avec un grand luxe d'érudition et de raisonnements théologiques, et il aboutit à une apocata- stase qui est plus radicale que celle attribuée à Origène. La démonstration est conduite avec un art si sûr qu'on se demande si vraiment une route ne va pas de la prédestination à l'enfer ante mérita au pardon universel confondant Bélial avec Jésus. Suprême paradoxe : ces thèses risquant de heurter si violemment, bien que de manière opposée, le sentiment chrétien de la justice, informent des matériaux d'une valeur rare. L'exégète, le moraliste, protestant ou catholique, feront bien, comme disait du Bellay, de piller les sacrés trésors de ce tempi© delphique. Je voudrais ici exposer les fondements de cette doctrine : le choix de grâce en général, l'élection de Jésus-Christ, puis l'élection de l'Eglise.

La doctrine de la prédestination est la somme de l'Evangile : Dieu choisit l'homme, il est pour lui Celui qui l'aime librement. Elle est fondée sur la connaissance de Jésus-Christ, puisque le Christ est à la fois le Dieu qui élit et l'homme élu. C'est pourquoi elle fait partie de la doctrine sur Dieu, puisque Dieu, en appelant l'homme, se déterminé lui-même. Sa tâche consistera à témoigner de la grâce fondamentale, éternelle, libre, principe de toutes les voies, de toutes les œuvres de Dieu.

Quelle méthode suivre ? Si nous ne connaissons et ne possédons Dieu qu'en Jésus-Christ, nous ne le possédons que dans le peuple que Jésus- Christ représente : le monde, l'humanité, l'histoire, n'ont de sens que par là. Ainsi vont s'enchaîner deux cycles de problèmes. Dieu établit, dirige,

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