ETUDES CRITIQUES

Analogia Iibertatis

Notes conjointes sur deux ouvrages récemment parus de F. Martv et P. Gilbert*

La métaphysique est de retour. Soulevant le voile épais jeté sur elle jadis par la génération formée chez Brunschvicg, repoussant aussi l'interdit prononcé par les post-modernes, il semble que la philosophia prima retrouve dans la pensée francophone une forme de légitimation: ouvrages, revues, colloques, chaires... commencent à lui rendre le témoignage de sa vivante présence et antecedence dans les débats contemporains. On peut certes la confondre ça et là avec des réminiscences douteuses, d'une piété de bon aloi mais d'une faculté spéculative fort limitée, qui découpent l'histoire de la pensée au cordeau d'un Aris- tote servilement répété ou d'un Cajetan littéralement pris. Mais on ne peut la réduire entièrement à ces intégrismes anhistoriques qui déshonorent son nom prestigieux de science de l'être: c'est aussi la grande métaphysique qui est de retour, mesurée à ses capacités fondatrices et à son aptitude dialogale. Les deux ouvrages, parmi tant d'autres, que nous nous proposons d'étudier ici critiquement, constituent une illustration assez frappante de cette fécondité retrouvée de la plus haute tradition de pensée. Il s'agit de la seconde édition du magistral travail du P. François Marty, SJ. (Centre Sèvres, Paris) sur l'analogie chez Kant et du grand traité de métaphysique du P. Paul Gilbert, sj. (Grégorienne, Rome).

Ces travaux auxquels nous nous confierons sont remarquablement apparentés, et méritent au plus haut point d'être rassemblés dans une même étude. Les perspectives de fond sont indéniablement irréductibles: primauté du sujet, du côté du P. Marty; primauté de l'être, pour le P. Gilbert. Mais en même temps la préoccupation est identique: il s'agit, pour l'une et l'autre vision, de comprendre le rapport de l'être à l'esprit, que l'on aille du sujet à la nature avec le commentateur de Kant ou qu'il faille étudier le passage de la différence ontologique au langage avec le