Dieu et la Réalité

Introduction à la « Process Theology »

« Love neither rules, nor is it unmoved » (A. N. Whitehead)

Comprendre un système de pensée, une philosophie, c'est d'abord comprendre ses intuitions de base, ses présupposés. L'idée que chaque système a des présupposés autour desquels tout s'organise, peut désorienter : ne suggère-t-elle pas qu'il est impossible de prouver la base même sur laquelle tout le système repose? Aristote nous avait déjà averti : « voir » que tout ne peut se prouver est un signe de sagesse. La preuve ne se situe jamais au niveau de la vérité ultime.

A la recherche de cette vérité dernière, un disciple apprit de son Maître Zen que le monde entier reposait sur le dos d'un immense éléphant. Après quelques jours les doutes le reprirent.

- « Maître, dit-il, j'ai une ultime question à poser. Faute de réponse, le monde perdrait à mes yeux toute consistance ».

- « Parle ! », lui dit le Maître.

- « Sur quoi repose l'éléphant sur lequel repose le monde? »

- « Sur le dos d'un éléphant plus gros encore ! »

Le disciple s'en alla, rasséréné. Puis il découvrit que la réponse obtenue ne le satisfaisait plus.

- « Maître, sur quoi donc repose l'immense éléphant sur lequel repose l'éléphant porteur du monde? »

- « Si je le savais, tout me serait connu ! »

Le Maître avait voulu faire comprendre que le fondement ultime de l'univers n'était pas un autre, un nme éléphant.

Entrer dans un système de pensée 1i c'est en découvrir les éléphants.

Bernard Loomer, qui a été le premier à appliquer le terme de «process philosophy» aux systèmes de Whitehead et de Hartshorne (et à qui j'emprunte l'histoire de l'éléphant), appelle ce genre de quête des intuitions de base « elephantine analysis ».