L'IDEALISME ALLEMAND FIGURE ACCOMPLIE DE LA MODERNITÉ *

La modernité c'est la primauté du sujet, la victoire de la subjectivité, une vision du monde subjectiviste. Et l'idéalisme allemand est le lieu par excellence où s'épanouit cette vision. L'idéalisme signifie la primauté du sujet dans la connaissance, sa priorité par rapport à l'être connu et en conséquence, le fait que dans un certain sens on ne peut affirmer aucune vérité, aucune valeur sans qu'elles ne soient venté et valeur pour un sujet. Dans ce sens, l'idéalisme signifie la primauté épistémologique du sujet mais ce stade kantien va être dépassé en faveur d'une primauté ontologique du sujet chez Schelling et Hegel. Et la modernité est essentiellement — même si elle récuse de temps en temps jusqu'à la catégorie même de l'ontologique — un jeu de variations sur cette primauté ontologique du sujet.

D'une certaine manière, le subjectivisme idéaliste est une réaction. Le scepticisme nominaliste de Hume croit démolir et la substance et le sujet, et Kant se donne la tâche de les restaurer. Mais le prix de cette restauration, c'est un immense déplacement. Dans la philosophie classique que Hume croit avoir pulvérisée, substance et sujet étaient des notions « objectives » : il s'agissait d'une Weltphilosophie où même le sujet était « substantiel ». Or, la révolution kantienne finit avec cet univers : désormais la substance elle-même va être une figure de Ylchphilosophie. Comme le dit Schelling : le grand mérite de Kant, c'est d'avoir compris que la substance n'était que sujet (1). Dans le kantisme, les grands thèmes de la métaphysique classique sont pour ainsi dire récupérés, mais au prix d'une véritable transposition. Dieu et l'immortalité deviennent des pos-