Abstract
L’objet de cet article est constitué par les motifs cartésiens dans la pensée de Leszek Kołakowski, l’un des philosophes polonais les plus connus et influents de la seconde moitié du xx e siècle. On essaiera ici de montrer que ce qui a organisé la pensée de Kołakowski, et ce non seulement dans sa dimension philosophique, mais tout autant politique, était une réflexion critique sur la légitimité et les limites de la quête cartésienne du savoir fondé sur l’évidence et, à la fois, objectif et vrai. Pour l’auteur de cet article Kołakowski – et avec lui, toute une formation intellectuelle, dont il faisait partie, connue sous le nom d’École d’histoire des idées de Varsovie – interprétait le cartésianisme comme un essai de mise en place du radicalisme intégral, tant philosophique que politique. Dans cet article, on défendra également la thèse suivante : pour Kołakowski et pour bon nombre de ses collègues – anciens marxistes –, le cartésianisme était une philosophie radicale non seulement de la vérité, mais aussi de la liberté. La question que Kołakowski adressait aussi bien à Husserl qu’à Descartes, notamment celle de savoir s’il est possible de découvrir les fondements du savoir, inébranlables et absolument incontestables, sera présentée comme un élément de sa stratégie pour surmonter le marxisme envisagé comme une idéologie qui réduit la liberté humaine à un simple épiphénomène.