Abstract
Cet article s’intéresse à la manière dont Aristote utilise l’hylémorphisme pour son explication de la reproduction sexuée dans la Génération des animaux. Il se concentre sur GA I 19 où Aristote établit que les menstrues sont analogues au sperma. Dans les théories de la double semence, le mâle et la femelle apportent l’un et l’autre une contribution de statut causal identique. Aristote montre au contraire que les menstrues ne sont pas du sperma ; menstrues et sperma jouent deux fonctions causales différentes dans la génération : les menstrues apportent la matière et le sperma, la cause motrice et la forme. Mais l’hylémorphisme suppose qu’il existe aussi une identité entre les deux contributions, puisque la matière menstruelle est en puissance ce que les mouvements de la semence du mâle sont en entéléchie. Aristote maintient donc une identité entre les deux contributions. Il la conçoit de deux façons : le plus souvent comme une identité analogique (les menstrues sont analogues au sperma), parfois comme une identité quasi générique (semence et menstrues sont l’un et l’autre du sperma, moins élaboré dans le cas des menstrues). Aristote hésite entre ces deux solutions : dans le premier cas, le dernier résidu utile devient ou menstrues ou sperma ; dans l’autre, c’est le sperma qui devient menstrues chez la femelle ou semence chez le mâle. Aristote semble avoir hésité à considérer que le sperma est forme, chez le mâle, et matière, chez la femelle, ce qui l’aurait conduit à afficher une sorte de théorie du double sperma, chose qu’il refuse en vertu de l’identité profonde qui existe selon lui entre les menstrues et la semence du mâle.