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Résumé

Le but de cet article est de jeter quelques lumières sur le fonctionnement de la polyphonie dans le discours et l’argumentation juridiques, en insistant sur l’importance des notions-clés d’(in)défaisabilité, de présomption, de polyphonie, d’échelle argumentative. Les premiers linéaments d’une théorie générale de l’argumentation juridique sont ici exposés (1). La théorie en question se veut topique (raisonnements défaisables) et logique (raisonnements indéfaisables). Face aux théories unidimensionnelles (réductionnisme logique ou réductionnisme topique) une théorie bidimensionnelle est souhaitable, qui inclue à la fois le traitement des raisonnements défaisables et indéfaisables. Afin de développer cette esquisse de théorie de l’argumentation juridique, plusieurs notions sont définies (2): la défaisabilité (2.1), la présomption (2.2), la polyphonie (2.3), les échelles argumentatives (2.4). Enfin, un tableau général de quelques marqueurs argumentatifs résume les différents rôles que peuvent jouer les arguments dans la polyphonie du droit (3).

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Notes

  1. Sans pouvoir dans le présent texte analyser en détail l’argument a fortiori, il faut signaler qu’il s’agit d’un argument lui-même déduit d’un autre argument: une sorte d’argument au second degré. L’argument premier passe pour accepté et l’argument a fortiori prétend tirer des conséquences moins hardies que le premier et dès lors constitue un procédé plus contraignant. Un court exemple: si une législation interdit de projeter sans autorisation un film à des amis sur un écran de télévision, à plus forte raison sur un écran de cinéma. Il va de soi que les arguments a fortiori ne sont contraignants que sous la clause ceteris paribus. Il sera question de l’argument a fortiori ci-dessous à 3.1.

  2. La difficulté d’offrir une claire définition de la présomption tient au caractère relativement hétérogène de la catégorie: les présomptions de l’homme (ou de fait) sont des hypothèses, alors que les présomptions légales sont des instructions, des directives, une partie de la loi. Les définitions habituelles rendent compte uniquement des présomptions de l’homme; les définitions en termes de charge de la preuve présentent un trait beaucoup plus typique des présomptions légales. Pour l’heure, il n’existe pas de définition qui englobe toutes ces facettes.

  3. Pour une étude du discours polyphonique, voir Bakhtine [3], Bally [5], Ducrot [10] et Nølke et al. [17]. La notion de polyphonie qui porte sur la multiplicité des énonciateurs, dont parle Ducrot, gagnerait certainement à être étendue également à la multiplicité des auditoires, notion popularisée par Perelman [20].

  4. Nous ne prétendons pas que la notion de défaisabilité reflète toutes les facettes des présomptions réfragables, mais nous attirons l’attention du lecteur sur un trait commun: la possibilité pour ces présomptions d’être renversées.

  5. Nonobstant est examiné ici comme préposition, synonyme de malgré (marqueur anti-orienté plus faible), non comme adverbe, synonyme cette fois de malgré cela (marqueur anti-orienté plus fort). Cette distinction est nodale pour notre propos, car les deux utilisations sont à la source de nombreuses confusions.

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Documents en ligne/sites internet

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Je tiens à remercier Yohan Benizri, Stephan Bleiberg, Ludovic Bocken, Sophie Cacciaguidi-Fahy, Yanis Denil, Samuel-Marc Goltzberg, Christophe Gurnicky, Philippe Kreutz, Quentin Landenne, Arnaud Van Waeyenberge ainsi que les évaluateurs anonymes, pour leur relecture et leurs précieuses remarques.

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Goltzberg, S. Esquisse de typologie de l’argumentation juridique. Int J Semiot Law 21, 363–375 (2008). https://doi.org/10.1007/s11196-008-9088-y

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  • DOI: https://doi.org/10.1007/s11196-008-9088-y

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