Le carême de silence de Grégoire de Nazianze : une conversion à la littérature ?
Abstract
Forcé d'abandonner la chaire épiscopale de Constantinople par le synode qu'il y présidait, Grégoire de Nazianze , rentré au pays, s'imposa un carême de silence durant lequel, et à propos duquel, il s'est amplement exprimé par écrit. Ni réaction émotionnelle, ni innovation de sa part, cet acte de volonté relève de l'anthropologie religieuse, mais aussi de l'histoire de la littérature. Orateur né, Grégoire embrasse jusqu'au mutisme, à l'occasion de la commémoration du sacrifice du Verbe incarné, le silence relatif auquel la Providence l'a voué. Il revendique toutes les vertus spirituelles que les traditions philosophiques païennes et chrétiennes prêtaient à cette ascèse anachorétique. Surtout, il les transfère - par opposition à un art oratoire mondain - à l'écriture, labeur solitaire et silencieux dont il fera dédormais profession, démontrant par l'exemple et l'apologie la conversion à la littérature de l'Antiquité tardive