Abstract
Les langues des signes sont des langues qui n’ont pas un système d’écriture qui leur est propre et qui, par leur nature visuo-gestuelle, ne peuvent pas être écrites phonographiquement. Les conséquences de cette « non‑scriptibilité » sont au centre des travaux menés à partir de 2000 par Elena Antinoro Pizzuto. EAP, décédée en 2011, mettait en évidence les biais que l’utilisation des « gloses », employées comme substituts de la transcription, induisent dans l’analyse linguistique des LS. Ces 10 dernières années, les avancées technologiques et méthodologiques ont rendu plus aisée la saisie automatique des données corporelles, l’annotation multilinéaire de corpus multimodaux et le maintien des liens entre les annotations et les vidéos, ainsi que la diffusion des vidéos sur lesquelles se basent les analyses. Toutefois, ces technologies et bonnes pratiques — bien que fondamentales — ne font pas office de système de transcription : ce sont des solutions qui suppriment une partie des symptômes liés à la non‑scriptibilité des LS, mais ne comblent pas l’absence d’un système de représentation graphique de ces langues. Les questions soulevées par EAP sont donc encore d’actualité. Si différentes tentatives pour transcrire les LS ont vu le jour, leur utilisation pour exploiter de vastes corpus de LS s’est souvent heurtée à leur faible lisibilité et/ou requêtabilité. En comparant les avantages et les inconvénients de ces systèmes, il est possible d’établir une liste des caractéristiques que devrait posséder un système de transcription des LS. Mais développer un système qui réunit toutes ces spécificités est un défi que les linguistes ne peuvent pas relever seuls : c’est dans la pluridisciplinarité, et en particulier dans le travail conjoint avec les spécialistes des aspects graphiques de l’écriture, que semble résider la solution. Cette approche, dite « grapholinguistique », est suivie par l’équipe GestualScript pour développer Typannot, un système de transcription typographique des LS et de la gestualité co-verbale.