Noesis 30:391-407 (
2018)
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Abstract
La présente étude part d’une discussion de la thèse exposée par Catherine Colliot-Thélène dans son ouvrage La démocratie sans « demos » selon laquelle la démocratie moderne est « sans demos », composée uniquement de sujets de droits individuels. Appliquée à la construction européenne, cette thèse s’avère féconde, mais aussi problématique. Si elle conduit à sortir des mythes du contrat social et du pouvoir constituant et de poursuivre la démocratisation par la seule garantie du droit subjectif, elle le fait néanmoins en maintenant l’un des axiomes principaux du contractualisme qu’elle réfute, à savoir l’idée que face à l’État seul l’individu est source de droit, non les corps intermédiaires, les communautés et les collectifs. Une autre tradition constitutionnelle fait pourtant plus efficacement l’économie du concept de pouvoir constituant, l’anglaise et l’allemande. Celle-ci développe l’idée d’une « constitution matérielle » ou « réelle », issue des rapports de la pluralité des puissances sociales et non de la volonté du législateur. On postule que cette tradition permet de mieux décrire l’intégration européenne et qu’elle livre des pistes précieuses pour démocratiser l’Europe.