Abstract
On applique ici la méthode de l’analyse de réseau pour comprendre les temporalités de la construction de l’imprimerie, comme activité économique associant des hommes de lettres et des acteurs économiques. À partir des informations contenues dans l’Incunabula Short Title Catalogue, deux types de réseaux sont construits pour les éditions imprimées à Venise entre 1469 et 1500. Le premier permet d’observer le vivier des noms d’auteurs présents dans les éditions. Le second permet d’aller plus loin dans les notions de centralité et d’autorité dans le réseau. Les presses vénitiennes se sont construites par l’utilisation réciproque des ateliers et des grands noms lettrés, dont le prestige légitimait les grandes entreprises typographiques. Avec le développement de l’imprimerie, les noms d’auteurs contemporains se font plus nombreux. Pour l’ensemble des lettrés impliqués dans l’imprimerie, cela se traduit par un rapport de force en leur défaveur. Les imprimeurs organisent eux-mêmes leurs collaborations en choisissant dans un vivier qui ne fait que s’accroître. Le prestige des auteurs est plus diffus et se nourrit de l’association de plusieurs noms dans une édition. Mais certains ont su particulièrement bien en jouer, comme le montre l’exemple d’Antonio Mancinelli. Ces réseaux éditoriaux, analysés dans leur épaisseur chronologique, permettent ainsi de redonner une vraie dimension temporelle à la construction d’une nouvelle industrie culturelle.