De analogieleer Van sint Thomas

Tijdschrift Voor Filosofie 20 (3):459-509 (1958)
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Abstract

L'ancien problème de la connaissance analogique semble jouir actuellement d'une certaine préférence de la part des métaphysiciens scolastiques. A bon droit. En effet, le problème de la connaissance analogique est d'une part absolument central pour la métaphysique thomiste, tandis que, d'autre part, il reste entouré d'un brouillard d'imprécision. A propos de la connaissance analogique, on peut se poser différents problèmes. Un problème historique d'abord ; quelles étaient les conceptions de S. Thomas lui-même sur ce sujet ? La tradition a plus ou moins canonisé l'interprétation de Cajetan, malgré le fait que, dès son origine, elle fut contestée par un interprète de S. Thomas, aussi compétent que fut Sylvestre de Ferrare. Dans les dernières années, cette interprétation a vu diminuer son crédit, en raison des critiques fondamentales qu'elle eût à subir et qui nous forcent à remettre à l'ordre du jour une question, dont on croyait détenir la solution définitive. Mais il n'y a pas seulement un problème historique concernant les conceptions de S. Thomas lui-même. A côté de celui-ci, se posent plusieurs problèmes d'ordre plutôt systématique. Il suffit d'avoir ouvert quelques traités de métaphysique et de théodicée thomistes pour s'en apercevoir. Dans ces traités, en effet, on peut distinguer trois cas de connaissance analogique. « Ens » se dit analogiquement 1º de la substance et des accidents, 2° de la créature et de Dieu, 3° de deux êtres créés p.e. Pierre et Paul. Quel rapport existe-t-il entre ces trois cas ? Le troisième cas, retrouvé chez certains auteurs modernes, mais guère explicitement traité ni par S. Thomas, ni par Ca jetan, est-il vraiment thomiste ? La connaissance analogique joue-t-elle un rôle dans les preuves de l'existence de Dieu ? La fameuse triplex via par laquelle on explique, parfois fort ingénument, l'origine de notre connaissance de Dieu, nous réserve d'autres problèmes encore. Si par un simple procédé d'épuration, on arrive à partir de concepts empruntés au monde, à une connaissance de Dieu, ne faut-il pas conclure alors que la connaissance de l'infini était déjà « impliquée » dans notre connaissance du monde ? Et que gardons-nous dans l'esprit, après avoir éliminé d'un concept des choses terrestres tout ce qu'il contient de fini, de limité ? Cette étude tâche de donner une réponse au premier des problèmes évoqués, le problème historique concernant les conceptions de S. Thomas à propos de la connaissance analogique. Les problèmes systématiques que nous venons de relever, déterminent plutôt la préoccupation qui préside à cet examen historique. Voici les principales conclusions de cette étude, conclusions que nous proposons à la réflexion du lecteur sans les vouloir défendre avec trop d'assurance. Le terme « analogia » est employé par l'Aquinate pour désigner un rapport d'ordre supercatégorial. Une connaissance analogique nous l'aurons, quand une chose est connue, non pas en soi, mais par son rapport avec une autre chose. La notion de « prédication analogique » ne semble pas tout à fait identique à celle de connaissance analogique. Elle est la prédication d'un terme communément attribué à différents sujets, dans des acceptions différentes entre lesquelles existe un certain rapport. Ce rapport consiste en ceci : que l'une des significations du terme commun est impliquée dans l'autre, comme terme de référence. Il suffit d'évoquer le paradigme classique de la santé pour remarquer que la définition s'y applique parfaitement. La notion de prédication analogique ne suppose aucunement l'existence des concepts analogiques, tels qu'ils sont conçus par Cajetan. Il est vrai, S. Thomas explique la prédication analogique comme tenant le milieu entre la prédication univoque et équivoque. Mais il importe de bien préciser ce qu'il entend par là. Cela ne veut pas dire qu'un terme analogiquement attribué, aurait un sens à la fois unique et divers, qui tiendrait le milieu entre une seule signification et deux significations différentes. Nous croyons que Duns Scot a bien vu en déclarant ce milieu impensable : un mot, selon Scot, a une seule ou deux significations, sans intermédiaire possible. Mais cette thèse scotiste n'est nullement en opposition avec la doctrine de la connaissance analogique de l'Aquinate. Nous pouvons dire que selon S. Thomas le terme analogique a deux significations. Ce qui constitue la seule différence entre la prédication analogique et la prédication équivoque consiste en ceci : que dans la prédication analogique les deux significations du même terme possèdent entre elles une certaine relation. Selon la conception de S. Thomas, il nous paraît évident, — l'Aquinate l'a d'ailleurs explicitement déclaré, — que toute prédication analogique suppose un « princeps analogatum », auquel se réfère l'acception du terme analogique, tel qu'il est dit des « analogata secunda ». Après cet examen portant sur la notion de prédication analogique en général, nous examinons les différents cas d'analogie en particulier : 1) le terme « ens » analogiquement attribué à la substance et aux accidents, 2) la connaissance analogique de Dieu et 3) la connaissance analogique de l'Etre à partir des « étants ». Cet examen confirme notre conception de la prédication analogique en général. Dans aucun des trois cas, nous ne retrouvons la fameuse analogie de proportionnalité de Cajetan. Dans aucun de ces trois cas, il n'est question des concepts Proportionnellement communs que Duns Scot a cru devoir récuser et dont Cajetan assume la défense contre le Docteur subtil. La connaissance analogique de Dieu et la connaissance analogique de l'Etre, — dont S. Thomas ne parle jamais explicitement comme d'un cas de connaissance ou de prédication analogique, — représentent tout à fait la même structure. Il n'y a entre ces deux cas que la différence suivante : la connaissance analogique de l'Etre est déjà la connaissance analogique de Dieu, mais considérée à un stade où elle n'a pas encore atteint son explication ultime. Cette identification nous aide à comprendre la thèse, clairement formulée par S. Thomas, que la connaissance de Dieu est impliquée dans la connaissance de la créature. En effet, la connaissance de l'étant, comme étant, n'est possible que grâce à la connaissance de l'être transcendant, source et fondement de tout étant : « actus omnium actuum ». Mais à partir de cette saisie de l'Etre, en tant que acte ultime de toute perfection, la voie pour arriver à l'affirmation de l'existence de Dieu est courte, si courte que S. Thomas passe ex abrupto, sans analyse, de l'une à l'autre. De là, l'étonnante concision de la quarta via, qui nous fait voir comment, pour S. Thomas, la connaissance de l'Etre transcendant est déjà la connaissance de Dieu « in nucleo ». Il résulte de notre étude que la prédication analogique de l'être occupe une place absolument centrale dans la métaphysique thomiste et dans les preuves de l'existence de Dieu. La première analyse de l'être de l'étant nous conduit à l'affirmation d'une certaine « différence ontologique », une non-coïncidence, entre l'étant et l'être, qui, tous deux, inséparablement liés dans la connaissance, ne sont connus qu'analogiquement c.à.d. l'un par son rapport avec l'autre. C'est par l'approfondissement de ce problème que le métaphysicien se voit obligé d'affirmer l'existence de Dieu. On s'explique ainsi clairement comment S. Thomas pouvait identifier la « scientia entis communis » avec la « scientia entis primi »

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