Abstract
L’article porte sur le rapport entre la phronèsis (prudence ou sagesse pratique) et la vertu éthique dans la conception aristotélicienne de l’action et du bonheur. La question principale est la suivante : faut-il penser, selon une conception « humienne », que, chez Aristote, les buts sont fixés par notre désir, tandis que la raison servirait de simple instrument pour déterminer les moyens de les atteindre? La thèse défendue est que la vertu de caractère donne bien le contenu des fins, mais cela ne conduit pas à reléguer la phronèsis au rang de simple instrument. En effet, la phronèsis est l’excellence de la délibération sur les choses en vue d’une fin. Elle nous permet de comprendre ce que signifie avoir une fin. Pour le démontrer, l’auteur examine conjointement le fonctionnement des syllogismes délibératif et démonstratif, qui sont tous deux des arguments explicatifs. Cette comparaison permet à l’auteur d’établir que la vertu éthique donne le « que » (« quoi faire »), alors que la phronèsis permet de comprendre le « pourquoi », c’est-à-dire en vue de quelle fin l’action doit être accomplie. La vertu complète suppose de saisir le « pourquoi » ; c’est pourquoi la phronèsis a une importance éthique et est nécessaire au bonheur.