Abstract
L'argent et la personne ont beau être différents, sinon opposés, ils entretiennent, depuis toujours, une relation d'intimité. Et elle s'intensifie aujourd'hui. L'argent contribue à libérer la personne, il peut aussi concourir au maintien de sa dignité. Mais, par ailleurs, l'argent saisit de plus en plus d'éléments et d'aspects de la personne : de son travail à sa vie privée, en passant par son nom, ses cheveux et autres produits négociables. Cette intimité est alors menaçante pour la personne. Elle entame la primauté de l'extra-patrimonial dans le droit de la personnalité, alors que l'extra-patrimonialité est consubstantielle à une personne conçue comme antithèse des choses. Dès lors, la menace pourrait atteindre l'unité même de la personne. Sous l'effet de l'objectivation diligentée par l'argent, la personne n'en viendra-t-elle pas à se scinder en deux entités, une volonté abstraite et désincarnée, et un agglomérat de choses, plus ou moins ouvertes au commerce juridique?