INTELLEKTUALISME EN VOLONTARISME: De antinomieën van het finalistisch goedheidsbegrip bij Aristoteles en Thomas van Aquino

Tijdschrift Voor Filosofie 17 (3):477-522 (1955)
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Abstract

Aristote aborda le problème du bien de plusieurs biais, et en fixa plusieurs formules et définitions. Nous pouvons pourtant dégager de sa philosophie du bien une ligne de pensée fondamentale. — Le thème du bien qui «est dans les choses mêmes» , qui prendra une grande importance chez S. Thomas, n'est chez Aristote qu'une vérité de bon sens, sans prétention métaphysique. Il marque simplement la différence entre le bien qui est objectif, et la vérité qui est dans l'esprit ; la nature logique de la vérité est le seule affirmation qui importe ici. Le caractère objectif du bien, insinué par cette distinction, se trouve cependant confirmé par toute la philosophie d'Ar.. La notion du bien s'applique d'abord aux «biens», les choses qui sont objets de l'appétit, mouvement centrifuge. Au niveau philosophique on appelle «bien» l'accomplissement intérieur auquel aboutissent les tendances appétitives. Le bien est donc relatif et déterminé par la matière . Chez l'homme ce bien immanent et absolu est la béatitude, l'englobant de tous les biens. Notons que la valeur éthique plus pure, l'amitié par ex., s'appelle «le beau». — A cette notion du bien correspond celle d'appétit. Il est tendance, mouvement vers l'accomplissement dans la fin , et comme tel il se dépasse et se résoud dans le repos de la possession. Chez l'homme l'appétit du bien se résorbe dans l'acte intellectuel de la sagesse qui accomplit son désir de béatitude, et seule en subsiste la fonction secondaire dans la tâche ordonnatrice que la volonté exerce vis à vis des sentiments sensibles. — Bien et appétit sont donc entièrement liés chez Aristote. Ses nombreux aperçus sur le bien sont tous portés par cette même notion finaliste. A travers toute son oeuvre, S. Thomas a toujours fait appel aux formules d'Aristote. Déjà dans le Commentaire sur les Sentences il opte décidément pour la définition finaliste du bien, délaissant celle du pseudo-Denis et celle créée par Philippe le Chancelier; seulement son explication y tourne encore à une conception Néoplatonicienne du bien. Mais dans le De Veritate S. Th. élabore une métaphysique du bien d'inspiration résolument aristotélicienne, et cela dans le cadre de la problématique des transcendentaux que le Chancelier lui a léguée. Il réunit les deux éléments qu'il trouve chez Ar. : sa notion du bien et celle de la tendance appetitive. Le bien est fin, et il est dans les choses mêmes; d'autre part l'appétit, ou la volonté, se rapporte à l'étant même qui, en tant que fin, est extérieur au sujet en tendance. Ces notions sont justifiées par le fondement ontologique donné à la théorie aristotélicienne de la connaissance : la connaissance ne peut rendre présentes dans l'âme les choses telles qu'elles existent en leur nature réelle, puisqu'elles sont matérielles : telles qu'elles, elles sont objet et fin d'une tendance centrifuge. A ce réalisme du bien et du vouloir, de style aristotélicien, S. Th. a cherché à donner un statut métaphysique. Le bien des êtres se trouve finalement en leur être qui fait exister réellement leur essence. — Ce concept d'être est imprégné d'une facticité peu métaphysique, qui ne donne au bien aucune intelligibilité intrinsèque. Mais cette facticité répond bien au réalisme actuel du bien, car «bien» signifie extériorité, qui, en tant que fin, est invincible. Elle repond également à la conception très essentialiste de la vérité. La question de la convertibilité du bien et de l'étant conduit S. Th. à abandonner quelque peu cette notion du bien. Elle le mène à l'élaboration d'un concept ontologique du bien, voisin de celui du Chancelier. En effet, puisque l'être, lieu spécifique du bien, fait partie de l'étant même, et rend celui-ci bon en sa totalité, l'altérité et l'extériorité qui marquaient le bien se trouvent plus ou moins surmontées. Le bien devient une qualité intrinsèque de l'étant, dont l'appétibilité ne constitue plus qu'un signe. D'ailleurs cette notion du bien ontologique correspond à la nature de la tendance, destinée elle aussi à se dépasser en un état stable de possession. Malgré ce cheminement ontologique du bien, S. Th. s'en tient à la finalité extrinsèque lorsqu'il entend fixer la notion formelle de bien. Et c'est sur cette notion-là qu'il fonde aussi sa théorie de la supériorité de la connaissance. L'examen critique de cette thèse intellectualiste nous a révélé toute l'ambiguïté de la théorie thomiste du bien : la définition du bien a été acquise dans la sphère des relations avec les choses, et ce qui est propre aux êtres matériels a également été transposé sur le plan métaphysique et promu à la dignité d'une théorie absolue de l'être et du bien. La Somme contre les Gentils opère une révolution dans la philosophie de S. Th.. L'être y est devenu une valeur vraiment métaphysique. Il est le principe de toute perfection et de toute actualité. Comme tel il s'associe favorablement à la notion ontologique du bien . Du coup la notion du bien se trouve relativée. Car l'être sur lequel il se fonde, est l'actualité de tout acte. Et c'est en tant qu'accomplissement immanent de l'étant en tendance appetitive qu'il est bon. — Dans cette oeuvre S. Th. a également recours à la notion finaliste du bien. Il distingue clairement les deux, et seule la dernière représente pour lui la définition formelle. Mais il est significatif qu'au cours de l'explication métaphysique du bien, un glissement s'opère vers la notion ontologique. Notons que la définition, à base aristotélicienne, du bien qui est dans les choses mêmes, ne figure plus ici. Elle dominait pourtant l'exposé du De Ventate. Mais elle y était liée à la notion primaire de l'être infra-intelligible. Avec l'être nouvellement valorisé elle ne peut plus s'accorder. La Somme Thêologique affermit la métaphysique du bien entamée dans l'oeuvre précédente. Le bien qui prédomine ici est la perfection totale du sujet. Et un étant n'est parfait que pour autant qu'il réalise en lui l'acte fondamental de l'être. Le bien, c'est donc l'être en tant qu'il est parfait d'une certaine façon. Ce n'est pas l'être directement et en lui-même, qui est objet de l'appétit, mais bien l'actualisation par l'être des puissances déterminées du sujet. — La comparaison que S. Th. instaure lui-même avec la doctrine sur la vérité confirme notre interprétation. Le vrai n'ajoute aucun élément déterminant à l'être, mais seulement la relation de présence en l'âme. Le vrai est absolument transcendental. La vérité, c'est l'être en tant que tel manifesté en l'âme. Aussi la connaissance actuelle est requise pour qu'il y ait vérité, alors que le bien ne suppose qu'une certaine appétibilité du côté de l'être. Sur le plan descriptif, le bien préexiste à toute tendance, puisqu'il coïncide avec les objets de l'appétit. Et au niveau de la justification métaphysique il se situe dans le dépassement même de l'appétit dans la conquête accomplie. En aucun cas le bien n'implique l'actualité de l'appétit. Toutes les données volitives ne se prêtent pourtant pas à être subsumées dans le schéma finaliste. Lorsque S. Thomas veut définir l'appétit rationnel, il se trouve amené à réserver ces catégories à teneur générale et métaphysique pour l'appétit infra-rationnel ; mais les concepts qui dans la métaphysique générale désignaient le vrai, en opposition au bien, traduisent, dans ces passages, le bien objet de la volonté. Ceci nous fait toucher du doigt l'ambiguïté des notions fondamentales de la métaphysique thomiste du bien. Dans quelques textes réapparaît le thème du bien dans les choses mêmes. Seulement une analyse critique nous prouve que cette formule n'est plus employée dans les textes qui donnent une définition métaphysique du bien. Elle sert à marquer la contingence du bien, par opposition au vrai, ou bien à caractériser la passion. En définissant occasionnellement le bien par cette formule S. Thomas continue de le réduire à l'aspect de contingence infra-intelligible, opposée à l'essence éternelle visée par la raison. Et son utilisation pour marquer le caractère passif du mouvement dit « passion » , n'est possible que parce qu'elle a toujours traduit une conception statique du bien. Ceci nous explique aussi pourquoi elle a disparu maintenant dans l'exposé formel sur le bien : la nouvelle métaphysique du bien qui fonde le bien comme la vérité sur l'être transcendental, devait nécessairement l'évincer. Aussi bien la thèse de la supériorité de la connaissance sur le vouloir, toujours établie à l'aide de cette formule dorénavant anachronique, ne peut elle plus nous convaincre. Pourtant cette formule exprimait bien la dualité qui paraît essentielle au bien et au vouloir, dualité qui conserve au bien son caractère dynamique et l'empêche d'être réduit finalement à l'ordre statique. L'on peut se demander s'il n'y a pas lieu de compléter la métaphysique thomiste du bien par la théorie thomiste de l'amour. Car l'amour constitue une unité extatique qui ne supprime pas la dualité. L'on pourrait peut-être aussi dépasser par là la relativité du bien. Car, notons-le, S. Th. n'a pas effectué lui-même la synthèse entre sa philosophie de l'amour et sa métaphysique du bien

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