Abstract
Deux courants de pensée jouent un rôle important dans la philosophie des mathématiques contemporaine. Le structuralisme, s’il n’est pas une idée nouvelle, continue de se déployer en des directions multiples – de la pratique mathématique jusqu’à ses dimensions ontologiques –, et de faire l’objet d’études, par exemple en direction des modalités de sa genèse. L’épistémologie historique, dont la conception classique a été largement enrichie récemment, est également au cœur de débats qui renouvellent la philosophie des sciences bien au-delà de ses problématiques classiques. Son usage en mathématiques requiert toutefois des analyses spécifiques du fait de leurs idiosyncrasies, des notions comme celle de rigueur, d’expérience ou d’ontologie y ayant un sens et une charge historique différentes de celles qu’elles ont dans les sciences de la nature. Le propos de cet article sera de mettre en situation certains de ces débats en se concentrant sur un des phénomènes les plus significatifs du xxe siècle mathématique: le structuralisme de Bourbaki. Il s’intéressera en particulier aux potentialités de l’épistémologie historique, en cherchant à montrer que ses outils permettent de mieux comprendre certains enjeux du structuralisme. L’accent sera mis en particulier sur deux notions clés dans les travaux de Rheinberger, Daston et Hacking, celles d’objets et de concepts épistémiques.