Abstract
Dans leurs textes théologiques trinitaires, Bonaventure et Thomas d’Aquin excluent que Dieu – Père, Fils et Saint-Esprit – soit une totalité, au nom de sa simplicité absolue. Alors que le créé est soit composé de parties, soit la partie d’un tout, l’incréé échappe à cette structure tout / parties. Toutefois Bonaventure et Thomas d’Aquin doivent justifier l’application à Dieu, par Augustin ou le Pseudo-Denys, du vocabulaire de la totalité, dont ils mettent alors à jour un sens transcendant. En vertu de la relation de création, la totalité créée préexiste dans la simplicité de l’incréé, dans une « totalité antérieure aux parties » (Thomas, citant les « Platoniciens », c’est-à-dire Proclus). La totalité ne désigne plus alors ce qui réunit l’intégralité des parties, mais ce qui est à la fois sans parties et non partiel, simple et complet. Au moyen d’un sens privatif du « tout », Bonaventure fait de la notion divine de totalité le symétrique de celle de simplicité absolue. Cette totalité transcendante est alors beaucoup plus qu’un concept, elle exprime une thèse : la plénitude passe par la simplicité radicale.