Abstract
Au début du deuxième livre des Seconds Analytiques ( APo. ), Aristote présente quatre types de recherche possible, qu’il distingue de la manière suivante : la recherche du que ; la recherche du pourquoi ; la recherche de si c’est ; et la recherche de ce que c’est. Le sens propre et les connexions mutuelles du premier, deuxième et quatrième types de recherche ne posent pas de grand problème, ayant par ailleurs été partiellement exposés dans d’autres contextes. Il en va cependant autrement du troisième type de recherche. La pertinence de telles difficultés peut être saisie par la double lecture que permet la clause grecque ei estin (« si c’est ») qui s’y rapporte. Devons-nous la comprendre dans le sens de « si telle chose est (ou : si telle chose existe ) » (par exemple, « si le centaure existe ») ou dans le sens de « si ceci est tel » (par exemple, « si ceci est un centaure »)? Dans le but de répondre à cette question, nous adopterons le programme suivant : 1. En premier lieu, nous ferons une analyse aussi proche et détaillée que possible de APo. II 1-2, de manière à déterminer le sens qui doit y être donné à la clause ei estin (« si c’est »). 2. Nous chercherons ensuite à démontrer la conclusion à laquelle nous avons abouti en nous aidant des chapitres suivants des APo., chapitres dans lesquels la question est à nouveau explicitement et implicitement invoquée. 3. Enfin, nous analyserons les autres passages du corpus aristotélicien dans lesquels la critique a relevé de supposées « hypothèses d’existence », et ce, de manière à vérifier si ceux-ci sont susceptibles d’une lecture compatible avec celle qui aura été donnée de APo. II 1-2. Nous en conclurons que l’on ne retrouve aucune trace de préoccupations existentielles dans les passages qui ont fait l’objet de cette recherche ni, en général, dans les passages connexes du corpus aristotélicien. Ainsi, la lecture existentielle de la clause ei estin et des hypothèses scientifiques qui y sont liées sont plutôt le fruit d’une contamination moderne.