Demander une assistance médicale à la procréation, recourir à l'avortement pour des raisons diverses, contrôler après coup une conduite sexuelle à risque par une pilule du lendemain, et bientôt peut-être exiger d'être euthanasié : depuis que l'État s'est engagé dans un processus de dépénalisation de ces pratiques médicales, on peut aujourd'hui faire beaucoup de choses de son propre corps quand il s'agit du début ou de la fin de vie. Cette liberté s'exerce néanmoins à une condition, toujours la même : (...) se présenter devant un médecin. Et que vous demande ce médecin? Presque rien, semble-t-il. Il vous demande de vous asseoir et de parler de votre état, de votre demande. Bref, de ce qui vous amène là. C'est ce " presque rien " dont il est question dans cet ouvrage. Un " presque rien " qui révèle, en réalité, un nouveau système de surveillance dans lequel le médecin prodigue informations et conseils à un sujet jugé désormais capable de prendre seul des décisions souveraines en matière de vie et de mort. Un face-à-face où apparaît le malaise de ceux qui assument la délicate mission de recueillir l'expression du désir ou de la détresse. À partir d'une longue enquête dans le secret des cabinets médicaux, l'auteur explique comment la régulation juridique a laissé place à des formes de pouvoir beaucoup plus sophistiquées, un dispositif souple de gouvernement des conduites qui laisse toute sa place à l'autocontrôle et à l'intériorisation par les individus des normes sociales. Elle montre ainsi comment, du cabinet du praticien jusqu'au Comité consultatif national d'éthique, c'est une nouvelle administration du vivant qui se met en place. (shrink)

Résumé Comment les institutions pensent-elles aujourd’hui ceux qu’elles administrent? Les discours de prévention en matière de santé depuis les années 1970 présupposent des capacités individuelles à l’autoévaluation : une introspection sans profondeur guidée par des représentants de l’État, et conjuguant jouissance du calcul et érotisation de l’autocontrôle. Mais, doublant cette gouvernementabilité libérale, l’intense dramatisation du récit de prévention depuis la fin des années 1990 signale le retour à une biopolitique plus impérieuse et plus conservatrice, axée sur une sacralisation laïque de (...) la vie. Celle-ci épaule une sédimentation de procédés gouvernementaux pourtant idéologiquement contrastés. (shrink)

Notre seuil de tolérance à la violence imposée par la domination sociale contribue à définir l’univers de contraintes dans lequel sont immergés les « SDF ». Il leur offre aussi des issues à la domination. Encore faut-il quelques dispositions sociales pour pouvoir les emprunter, pour saisir les maigres chances représentées par ce qui peut alors devenir un atout : la définition sociale d’eux-mêmes dont les plus dominés font l’objet.We apprehend homelessness according to our own tolerance level toward physical violence imposed (...) by deprived situations. A given data contributing to define homelessness, it may represent, too, means for short time survival tactics. Harsh personal and social conditions are necessary however to adapt oneself to such a definition of themselves imposed to the most dominated citizens. (shrink)

In this article I evaluate a resurrected French resistance movement--to biotechnological commodification. The official French view that ‘the body is the person’ has been dismissed as a ‘taboo’ by the French political scientist Dominique Memmi . Yet France has indeed resisted the models of globalised commodification adopted in US bioechnology, as, for example, when the government blocked a research collaboration between the American firm Millennium Pharmaceuticals and a leading genomics laboratory, le Centre d’Etude du Polymorphisme Humain, on the (...) grounds the ‘French DNA’ should not be given away. -/- This example, however, itself suggests why the ‘new French Resistance’ is not altogether liberating. The absolutist conception of all bodies as belonging to the French state—indeed, as constituting the body politic —is so potentially invasive that a counter-ideology of inviolability of the body is maintained assiduously. This inviolability is defended particularly strongly against commercialisation, but only at the moment when tissue is taken from the individual subject, who is not to be paid or compensated-- although commercial enterprises who subsequently use the tissue are not similarly constrained. -/- . (shrink)

This chapter provides an overview of the issues involved in recent debates about the epistemological relevance of emotions. We first survey some key issues in epistemology and the theory of emotions that inform various assessments of emotions’ potential significance in epistemology. We then distinguish five epistemic functions that have been claimed for emotions: motivational force, salience and relevance, access to facts and beliefs, non-propositional contributions to knowledge and understanding, and epistemic efficiency. We identify two core issues in the discussions about (...) such epistemic functions of emotions: First, even though it is plausible that emotions are involved in epistemic processes, it may be doubted whether they really matter for the normative question of what counts as knowledge or justified belief. Second, some of the epistemic functions claimed for emotions in general may only be attributed to some specifically epistemic emotions, which have been present all along in traditional epistemology, albeit under different labels such as ‘intuitions’. (shrink)

In this paper, we build upon Bruno Latour’s political writings to address the current impasse regarding algorithms in public life. We assert that the increasing difficulties at governing algorithms—be they qualified as “machine learning,” “big data,” or “artificial intelligence”—can be related to their current ontological thinness: deriving from constricted views on theoretical practices, algorithms’ standard definition as problem-solving computerized methods provides poor grips for affective dissensions. We then emphasize on the role historical and ethnographic studies of algorithms can potentially play (...) in the politicization of algorithms. By both digging into the genealogy of algorithms’ constricted definition and by making their contemporary constitutive relationships more visible, both historical and ethnographic studies can contribute to vascularizing algorithms and making them objects of enlarged disputes. We conclude by giving a flavor of the political potential of the vascularization efforts we call for, using materials from an ethnographic study conducted in a computer science laboratory. (shrink)

There is no direct, constant relationship between the anthropological and cultural aspects of modernity. Anthropologically modern peoples display a certain heterogeneity that is not unconnected with earlier peoples, and the culture produced by modern humans, which is also heterogeneous, is differentiated diachronically and according to territory. Though paleogenetic research seems to point us to a single, African source for modern peoples, who had replaced the pre-sapiens populations in Eurasia, this view is not completely proven or accepted. On the other hand, (...) paleo-genetic research has contributed to our relinquishing the hypothesis of a multiregional ‘total continuity’ of local pre-modern populations in the Old World. Indeed the theory of a partial replacement, by a migration ‘out of Africa’, appears to be getting increasingly plausible. This article deals with the problems of the origins of modern man from the points of view of anthropological, paleogenetic, paleoenvironmental and cultural approaches. (shrink)

Cet ouvrage étudie la langue du vrai dans la première modernité. La vérité dépend-elle d'une belle énonciation? Y a-t-il des règles institutionnelles spécifiques d'énonciation de la vérité? Pourquoi la doctrina constitue-t-elle l'horizon de tout savoir et de tout enseignement prétendant à la vérité?

"Dans l'Espagne du XVe au XVIIe siècle, avec les grands voyages et les explorations de mondes inconnus, l'art de bâtir des palais ou des jardins, d'écrire un voyage expérimental ou une quête mystique, de peindre des paysages et des gloires célestes témoigne d'un renouvellement du regard - philosophique, alchimique, théologique, politique. Habiter le monde s'inscrit dans une perspective géométrique et mystique de l'infini et de l'éternité. Il y aurait peut-être là la marque d'une spécificité hispanique. L'ouvrage s'articule autour de quatre (...) parties consacrées aux palais, jardins et demeures spirituelles, aux merveilles de l'univers de Séville à Mexico, à la mystique des paysages et à la magie naturelle, à la représentation de l'infini" --. (shrink)

Pour Thomas d’Aquin, la Trinité n’est pas d’ordre philosophique mais théologique, dépendant de la révélation biblique. Les controverses trinitaires sont déjà loin, les résolutions conciliaires aussi, mais Thomas, à plusieurs reprises et à chaque fois de manière différente, expose un traité des plus délicats. Il s’agit de poser trois personnes dans une seule substance. L’un de ses principaux apports est d’enrichir les relations d’origine qui distinguent les trois personnes en relations substantielles. Thomas tire les concepts au-delà de leur acception ordinaire, (...) manifestant ainsi la manière qui est la sienne d’entrecroiser philosophie et théologie. (shrink)

Victor Hugo a soutenu : « Dieu, cela n’est pas tant que ce n’est pas en pierre / Il faut une maison pour mettre la prière. » L’histoire de l’incarnation christique suffit-elle à expliquer la place de la pierre dans l’imaginaire des sociétés culturellement issues du christianisme? En quoi l’Église – la communauté et l’institution nées de l’enseignement du Christ – poursuit-elle ce projet d’inscription de la chair dans la pierre? Dans quelle mesure la parole de Jésus à l’un de (...) ses apôtres, Pierre – « tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Église » (Mt. xvi, 18) – est-elle fondatrice non seulement de la « pétrification » de l’Église, mais plus généralement du poids donné à l’architecture et au bâti dans les mille et une façons occidentales de penser la société et de faire communauté? (shrink)

Au xvie siècle, l’autobiographie et le récit de voyage étaient étroitement liés et suivirent pendant quelques décennies une évolution parallèle. Thomas Platter l’aîné essaya de fournir dans sesMémoires la description d’une vie exemplaire retraçant ses expériences multiples sur les routes d’Europe. Son fils Felix nous laissa un ouvrage disparate (un mélange de journal, de récit de voyage et de mémoires) où l’auteur paraît omniprésent. Sa conception de l’écriture autobiographique rappelle celle de Montaigne. Le jeune frère Thomas suivit rigoureusement les règles (...) émises par les théoriciens du voyage, condamnant toute opinion subjective. Les ouvrages des Platter nous donnent le meilleur exemple de l’évolution du genre (auto-)biographique entre la Renaissance classique et le Baroque dit sauvage. (shrink)

Miguel de Cervantès a ouvert le dossier des rapports de « la vérité » avec le « réel », appliquant à cette question toute sa puissance visionnaire. Dans au moins deux de ses œuvres, il compose une approche très originale de ce questionnement : Le Retable des Merveilles, joué longtemps avant sa date de publication en 1615, et le fameux Don Quichotte. Le réel est-il « vrai » ou répond-il d’une construction mentale confinant à la folie? Le Retable, par la (...) mise en scène hallucinatoire de la pseudo-réalité suggérée, dénonce l’emprise du pouvoir politique sur l’imaginaire collectif, soumis à la domestication qu’impose le Saint-Office, tandis que le Quichotte, irrémédiablement placé sous la direction de la « doctrine dulcinéenne », brave l’oppression du système inquisitorial en créant sa propre épistémologie fondée sur un « code ». En matière de vérité, comme le dit le Chevalier de Lions, ne s’agit-il pas de « peser la chose et la mettre à son vrai point »? Aussi, dans ces deux œuvres, le lecteur est-il constamment invité à transcender toute lecture littéraliste, à surplomber la quiétude des banalisations indéfiniment répétées, pour découvrir ce qui constitue l’épistémologie quichottienne, libératrice du sens. Et si ce « point de vérité » se trouvait précisément dans le nom du Quichotte, audible en une langue bannie de la Péninsule en 1492 dont l’auteur semble être un fin connaisseur? L’histoire du Quichotte devient alors l’histoire de la vérité en mouvement, accompagnée de la grâce tutélaire de Dulcinée, que le lecteur est appelé à suivre, peut-être même à rattraper, pour mieux comprendre combien le réel se code selon une haute folie que le rationalisme ne rejoint pas. (shrink)

Den 27. november 1985 døde den franske historiker, Fernand Braudel, som af mange verden over regnes for en af de betydeligste historikere nogen sinde. Han var Annales-skolens førende skikkelse.

M. Buber, figure majeure de l'intelligentsia juive et européenne, a entretenu sa vie durant une immense correspondance. Propose une sélection de près de 200 lettres, des premiers échanges du jeune Buber avec Theodore Herzl, le fondateur du sionisme, jusqu'à l'année de sa mort en 1965. Sa correspondance montre qu'il a toujours souhaité un retour de la diaspora juive en Palestine.